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03/06/2020

ANNE, EVÊQUE !

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ANNE évêque !

Elle aura au moins réussi à faire entendre une voix de femme dans une affaire qui leur semblait pourtant totalement fermée. Ma formidable camarade Anne Soupa, avec qui j’avais, il y a plus de dix ans, porté plainte contre le cardinal André Vingt-Trois pour propos sexistes devant le tribunal ecclésiastique de Paris, Anne donc, revient troubler avec talent le petit monde feutré des manœuvres intracléricales en faisant officiellement acte de candidature à l’archevêché de Lyon, lequel est vacant depuis que le pape François a accepté la démission de Philippe Barbarin. Bien sûr, l’idée semble au premier regard loufoque. Mais, comme elle le dit elle-même : « C’est donc un geste fou, mais le plus fou, c’est que cela paraisse fou alors que cela ne l’est pas. » Il est vrai que lorsqu’on lit son curriculum vitæ, on est obligé d’admettre que ni les qualités ni les compétences ne lui manquent et que beaucoup d’Éminences n’en alignent pas tant, et de loin. Il est vrai aussi qu’elle présente un défaut majeur, celui de n’être point mâle… C’est bien là que le bât blesse et c’est l’un des points qu’elle souhaite mettre en lumière : l’invisibilité des femmes dans l’Église catholique. On le sait depuis longtemps, si les femmes n’étaient pas là, plus rien ne tournerait et, pourtant, on leur dénie toute forme de reconnaissance puisque leur « nature » ne leur permet pas d’être prêtres. Mais notre rusée amie souligne avec sa candidature spontanée un autre point qui, lui, touche les hommes et les femmes dans l’organisation du catholicisme, à savoir la concentration entre les mains des seuls « clercs » des trois grandes responsabilités – en latin, c’est plus chic, on dit munera, pluriel de munus –, qui sont la charge de la sacralité, la charge de l’enseignement et celle du gouvernement. Elle souligne qu’il y a sept ans déjà, à l’orée de son pontificat, « le pape François a demandé aux théologiens de mieux distinguer prêtrise et gouvernance afin de faire une place pour les femmes » et que, depuis lors, rien n’a été entrepris. Elle prend donc le pape au mot et revendique pour elle, non pas le pouvoir sacré, qu’elle dit laisser très volontiers aux prêtres, mais ceux de la gouvernance et de l’enseignement, pour lesquels, sans fausse modestie, elle se dit être tout à fait idoine. Pour la bien connaître, je certifie que c’est exact : bonne patronne, fine bibliste, femme de cœur, précise, organisatrice, sachant rendre les gens « capables »…

Un comité de soutien s’est formé, avec, au premier rang, La Parole libérée. Pour le rejoindre, écrire à anne.eveque@gmail.com

Christine Pedotti

Photo : Gilou60 / CC BY-SA

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