30/03/2023
HALTE AU FEU
Photo : Florian Pépellin, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons
" Il faut savoir terminer une grève », disait Maurice Thorez. Ici, il faut dire : « Il faut savoir retirer une loi. » La sagesse prônée par le leader communiste est ce à quoi il faut aujourd’hui appeler l’exécutif, et en premier lieu le Président. Une main lui est tendue, celle du très sage Laurent Berger, qui, comme nous le suggérions la semaine dernière, propose non de retirer la loi mais de suspendre son application. Oui, c’est possible : si la Constitution fait obligation au président de la promulguer, il peut le faire et suspendre sa mise en œuvre, le temps de reprendre langue avec les partenaires sociaux, de discuter sereinement d’une possible loi sur les conditions de travail que tout le monde appelle de ses vœux. En bref, il faut faire de la politique et avoir le courage du compromis. Peu importent les raisons économiques ou financières, bonnes ou mauvaises, qui ont présidé à l’élaboration de cette loi. Ça ne passe pas, ça ne passera pas, même si les manifestations venaient à s’essouffler.
L’essoufflement ou l’étouffement ne sont pas des options. Il nous faut respirer.
C’est pourquoi le moment est désormais politique. Il faut céder, apaiser, reculer, parce que c’est précisément ça faire de la politique. Peu importe d’avoir raison ou pas. Peu importe ce que disent calculs et prévisions. Il faut lire les cœurs, sonder les âmes, comprendre les colères et non seulement les respecter mais aussi les aimer en ce qu’elles sont le reflet de véritables souffrances, de sincères angoisses. Les Français et les Françaises ne sont pas seulement des unités comptables mesurées par l’Insee. On trouve dans la Bible une étrange sagesse : il y est interdit de faire un recensement des humains. David est condamné par Dieu pour l’avoir fait – évidemment pour lever des impôts. Pourquoi ? Parce que les êtres humains, aujourd’hui, les citoyens et citoyennes, ne se résument pas à des statistiques, et l’espérance de vie, réalité mathématique, ne dit rien des destins individuels. La politique ne traite pas des chiffres mais gouverne des êtres humains.
Sans doute la potion est-elle amère pour le Président, et le calice plein de lie. Mais c’est la seule bonne issue. Sa mission n’est pas seulement d’équilibrer les comptes, elle est de maintenir l’unité de la nation, et c’est maintenant.
Christine Pedotti
Les commentaires sont fermés.