Le pape a exclu des prochains groupes de travail sur le synode la question du diaconat féminin. Pour les membres du pôle action du Comité de la jupe, la justification qui a été donnée par la sous-secrétaire du synode est « un peu grossière ». Elles rappellent que la question des magistères féminins est posée depuis plus de cinquante ans.
- Sylvaine Landrivon et Carmen Chaumet,
Dans l’instrument de travail issu des premières rencontres synodales fin 2023, le thème de la place des femmes au sein de l’institution catholique a été mentionné comme un sujet à approfondir. Or, au moment de choisir les pistes à traiter pour octobre prochain, nous avons appris le jeudi 14 mars que la constitution de dix groupes de travail ne prendrait pas en charge les dossiers concernant les femmes, ceux-ci étant renvoyés à octobre 2025.
Et qui vient justifier ce nouveau report relatif aux magistères féminins ? Nathalie Becquart, mandatée pour nous expliquer sans sourire que nous avions été « prévenu (es) dès le départ que tout ne changerait pas d’un seul coup. L’Église ne fonctionne pas comme une révolution. » Et d’ajouter : « Dans nos cultures occidentales, où l’on est parfois focalisé sur les résultats à court terme, cela peut être difficile à comprendre. Mais il faut comprendre que ce synode fait entrer l’Église dans un processus de long terme, qui est la conversation synodale de l’Église. » Quelle notion du temps plane donc sur Rome ? Cette mandataire a-t-elle oublié depuis combien de temps, on « promène » les femmes avec l’éventualité de cette ordination diaconale ?
Un espoir déçu
Déjà en 1967, quand l’institution de diacres permanents masculins promulguée en 1964 a été rendue effective, la question d’ouvrir les charges de la liturgie, de la parole, et du service aux femmes a été posée à Paul VI. Il va sans dire qu’aucune suite n’a été donnée à cette éventualité. En 1971, la Conférence épiscopale canadienne revient sur le sujet, mais comme il demeure tout aussi dérangeant, il est aussitôt retiré des thèmes du synode. Il en est de même avec les Conférences épiscopales allemande en 1976 et américaine en 1984, et ainsi régulièrement, pour toujours aboutir à une éviction du dossier
Avec le changement de souverain pontife, un espoir est apparu en 2016 quand le pape François a ouvert une commission spéciale pour étudier la possibilité du diaconat féminin (1). Des théologiennes et théologiens avaient contribué à l’étude de ce ministère, en rappelant que du temps des premières communautés chrétiennes, la présence de femmes en responsabilité était avérée.
De grands exégètes, comme Michel Quesnel (2), les mettent en évidence dans l’entourage de Paul ; et l’ecclésiologie ne peut pas ignorer comment fonctionnaient les « églises de maisonnées » décrites par Marie-Françoise Baslez. Pourtant, malgré tous ces arguments théologiques, il ne s’est pas passé grand-chose… D’ailleurs, le Synode d’Amazonie en 2019 a lui aussi réclamé davantage de place pour les femmes et est revenu sur l’ouverture du diaconat. Là encore, cela n’a abouti à rien et nous
l serait temps que le Vatican fasse preuve d’un peu plus d’imagination pour les tenir à distance, en ne leur accordant que quelques « miettes » comme l’acolytat et le lectorat, et en brandissant toujours, comme pour les consoler, les valeurs de « dignité » et de « garde des berceaux ».
(1) Phyllis Zagano et Bernard Pottier, « Que savons-nous des diacres femmes ? », in Revue des facultés de Théologie et de Philosophie de Laval, Vol 74. N° 3, 2018, p.437-445
(2) Michel Quesnel, Paul et les femmes. Ce qu’il a écrit, ce qu’on lui fait dire, Paris, Médiaspaul, 2021.
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