23/06/2021
RESSENTIMENT
Publié le 17 juin 2021
par Christine Pedotti
Il faut revenir sur l’épisode de la gifle infligée au président de la République lors de son déplacement la semaine dernière. D’abord, pour lui donner raison sur le fait qu’il ne faut pas en exagérer la portée. En effet, tout homme ou femme politique se sait être une cible potentielle. Et qu’est-ce qu’une gifle comparée à l’attentat du Petit-Clamart contre Charles de Gaulle – 150 balles tirées, 14 atteignant le véhicule.
Plus intéressants sont les réactions et commentaires à l’évènement, lesquels dénoncent une « montée de la violence » en politique. Le rappel des attentats d’autrefois montre que la violence a toujours existé. Et pourtant, nous avons le sentiment diffus et certain que nous sommes entrés dans des temps brutaux. Il est vrai que le mouvement des gilets jaunes s’est singularisé par des scènes de violences urbaines dont le but avoué était d’atteindre le cœur de l’État ; il a fallu barricader l’Élysée, une porte de ministère a été défoncée, la préfecture a été incendiée au Puy-en-Velay, et de nombreux élus de la majorité ont été pris à partie jusqu’à leur domicile tandis que leurs permanences étaient mises à sac. Une montée de la violence policière contre les manifestants y a répondu. Mais, là aussi, un peu de profondeur historique nous rappellerait que les années 1970 connurent des niveaux de brutalité bien supérieurs avec des lois dites « anticasseurs » et les attentats d’Action directe.
La violence est-elle aujourd’hui plus « commune » ? Sans doute, les réseaux sociaux permettent-ils à monsieur et madame tout-le-monde de se croire plus écoutés et entendus qu’ils ne l’étaient autrefois au Bar du commerce ou devant la machine à café. Les mots « pour rire » dépassent la pensée. On se moque en traitant le président de « tête à claques »… et voilà qu’il en prend une. Ce passage à l’acte presque « impensé » est aussi ce qui a caractérisé l’assaut du Capitole en janvier dernier à Washington.
Finalement, c’est peut-être l’analyse de Cynthia Fleury, interrogée dans TC cet hiver, qui est à la fois la plus pertinente et la plus inquiétante. Elle voit se lever « l’homme du ressentiment », rassasié de jalousie et d’amertume, levain du fascisme.
Il est certes naturel d’être irrité, agacé, et même « en colère » ; reste que Camus a toujours raison : « Un homme, ça s’empêche. »
Christine Pedotti
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