24/06/2022
LE GRAND BAZAR
Publié le
On fait mine de s’étonner d’un résultat électoral pourtant prévisible, pour peu que l’on ait écouté ce que les précédents scrutins et les études d’opinion disent avec une parfaite constance depuis des mois. Chacun s’accordera à reconnaître que, si Emmanuel Macron a été réélu, c’est par désaveu de la concurrence bien plus que par adhésion à sa personne ou à son programme, celui de la raison libérale, du pragmatisme économique, d’un néocolbertisme jacobin, d’une écologie des très petits pas – sa seule conviction forte étant celle de la nécessité de la dimension européenne. Bref, rien qui fasse rêver.
Dès sa réélection, les études ont montré qu’une majorité de Français et de Françaises (60 %) souhaitaient voir arriver à l’Assemblée nationale une modération à la politique présidentielle. Dans le même temps, la dame aux chats continuait de ronronner doucement, forte de ses treize millions de suffrages du second tour, faisant la chattemite, toute parée de modestie. En face, la Nupes rugissante quittait sa robe de tortue sagace pour enfiler le costume de la grenouille qui allait défaire le bœuf macroniste.
Et les Français et Françaises ont obtenu ce qu’ils voulaient ; tant par l’abstention que par leur vote, ils ont refusé la majorité au président, laissé la gauche à son étiage d’un quart de l’électorat, et envoyé quelque quatre-vingt-dix députés d’extrême droite à l’Assemblée pour qu’on n’oublie pas ce vote qui ne cesse de monter et devient – hélas – plus que banal, ordinaire.
Et maintenant, que faire ? La question se pose à tous les partis, pas seulement à celui du Président. Le monde politique français va-t-il être capable de trouver des accords, des compromis, des alliances – tout ce qu’on loue et envie dans les démocraties parlementaires voisines ? Il y a tout lieu de penser que non. Faudra-t-il persister à instaurer un scrutin proportionnel ? Se résigner au retour du fait majoritaire, ou le choisir ? Le grand chambardement commencé en 2017 connaît un nouveau rebondissement que le locataire de l’Élysée n’avait sûrement pas anticipé. Au milieu de tout ce bazar, il est une chose sur laquelle on peut parier sans grand risque ; on revotera avant un an d’ici. Reste à savoir si on le fera par temps clair ou sous avis de tempête.
Christine Pedotti
Photo : Faces Of The World (CC BY 2.0)
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