Oui, bien sûr, il suffit de manier efficacement la force, d’emprisonner les protestataires, de tirer sur la foule… Mais combien de temps cela peut-il durer ? En Iran, le mouvement des femmes, et désormais des hommes et des femmes, montre que le temps joue contre les autocraties. C’est peut-être aussi ce qui se passe actuellement en Chine, où les populations confrontées à la violence et l’arbitraire des confinements liés à la politique « Zéro Covid » commencent à se rebiffer.
On se prend à espérer que les familles des mobilisés russes envoyés sur le front d’Ukraine auront, elles aussi, le courage de faire entendre leur voix pour sauver leurs hommes. L’histoire regorge hélas de protestations écrasées dans le sang. Mais elle n’abonde pas moins en tyrans démis, en dictatures renversées. On peut même affirmer sans erreur, au regard de l’histoire longue, que, au bout du compte, le peuple est toujours vainqueur… mais au prix de combien de souffrances, de combien de sacrifices ? Quels sont les ressorts de ces révoltes ?
D’abord, le blocage ou l’inexistence du processus démocratique. Pourquoi risquer sa vie si le changement peut venir du dépôt d’un bulletin dans une urne ? Cette simple observation devrait nous faire chérir nos régimes démocratiques, quels que soient les défauts que nous leur trouvons. Un autre grand ressort est lié à la perte de l’équilibre entre la liberté et la sécurité. En effet, le principal argument déployé par les régimes autoritaires est celui de la sécurité. Certes, laissent-ils entendre, les libertés publiques sont bafouées, mais la paix civile est assurée. La Chine, par exemple, promeut un modèle – dit d’« harmonie » – au nom duquel la population est supposée accepter des mesures de surveillance étroites. Le gouvernement chinois semble pourtant avoir mal évalué la soumission de sa population. Lorsque les mesures de protection mettent en péril la sécurité et la vie des personnes, elles ne sont plus supportables. En Iran, c’est la violence et l’immobilisme du régime qui le font vaciller. Le sursaut populaire sera-t-il suffisant ? Peut-être pas cette fois… mais, sinon, la prochaine ?
La grande leçon est celle de la résilience des démocraties : une leçon que la monarchie catholique romaine devrait peut-être méditer…