28/03/2024
AU COEUR DE LA NUIT
Comment peut-on célébrer Pâques alors que le monde est plongé dans de tels conflits, de tels drames, de telles douleurs ? Pourtant, nous aimerions tant nous réjouir, trouver à cette saison des couleurs de printemps, de renouveau, de légèreté. Mais n’est-ce pas nous tromper sur le véritable sens de Pâques ? D’ailleurs, si nous regardons l’état du monde au moment de la mort de Jésus, difficile de ne pas y trouver des éléments communs à celui d’aujourd’hui. La tragédie, hélas, n’a pas d’âge. Un pays envahi, occupé, des responsables civils et religieux ordinairement lâches. Des amis sans courage, des traîtres, des couards. Il y a, en ce jour d’exécution à Jérusalem, une sorte de cristallisation du mal, de la bêtise, de la lâcheté, de l’injustice, du mensonge.
Vous me direz : oui, mais il y a le matin de Pâques. Est-ce si simple ? La lumière de ce matin-là n’est pas un éblouissement. C’est une lumière qui vient comme un murmure, presque encore une lueur, ténue, fragile, une lumière qui s’insinue au cœur du deuil et de la tristesse des femmes qui sont montés au tombeau au seuil du jour. Ici pas d’éclat, pas d’effets grandiloquents, juste une sorte de balbutiement. Des mots qui tentent de cerner ce que la raison ne peut pas saisir, ce que l’espoir ne peut pas porter. Pâques n’est pas un gros pansement sur nos misères, ni un analgésique, ni une consolation pour atténuer les malheurs du temps. Pâques n’efface ni les blessures, ni la douleur. Pour preuve, le Ressuscité porte sur son corps les traces de son supplice. Et pourtant, cette toute petite lumière fait son chemin dans les cœurs.
À l’aube, elle fait courir les femmes, le soir, les disciples d’Emmaüs. Peut-être est-elle capable de nous faire courir nous aussi, à temps et à contretemps ? La puissance d’une fragile étincelle comme arme contre le mensonge énorme, insolent : voilà ce que nous affirmons dans la nuit de Pâques. Depuis des siècles, cette toute petite lumière ronge le mensonge. C’est ce que chante l’Exultet qui s’élève dans la nuit. Pâques n’est pas un happy end, ce n’est qu’un début, un commencement. Il n’y a là rien de facile : rien d’aisé à croire ; rien de simple à vivre. Juste quelque chose qui vacille dans la nuit. Et c’est ce dont nous avons besoin. Encore et toujours. Réjouissons-nous, la nuit n’est pas la fin de l’histoire.
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Christine PEDOTTI
15:48 Publié dans FOI, RELIGION, SPIRITUALITE | Lien permanent | Commentaires (0)
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