‣ Un an après le succès du film « Des hommes et des dieux », une nouvelle manière de parler de religion s’impose au cinéma.
‣ Hier, quelques acteurs et professionnels du cinéma se sont retrouvés à l’abbaye de Lérins, pour un aperçu de la vie monastique.
‣ Ce « Festival de silence » était proposé parallèlement au Festival de Cannes.
![Brigitte Fossey Cannes.jpg](http://mdfbob.hautetfort.com/media/02/01/3346855125.jpg)
Les acteurs Michael Lonsdale(de dos) et Brigitte Fossey échangent avec Dom Vladimir Gaudrat, abbé de la communauté de Lérins.Hier, le Festival de Cannes s’est o ert une parenthèse spirituelle sur l’île Saint-Honorat, à quelques encablures de la Croisette et de son animation.
Les salles obscures auraient-elles été touchées par la grâce ? La question peut prêter à sourire. Mais à en croire Sœur Geneviève Roux, religieuse et cinéphile avertie, un vent de spiritualité souffle sur la Croisette. Cette xavière, responsable d’un ciné-club de Nice, habituée du festival, se dit même « frappée » par l’omniprésence de « la question du sens » dans la sélection officielle de cette année : Jeanne captive de Philippe Ramos, Habemus papam de Nanni Moretti ou encore L’Arbre de vie , de Terrence Malick…
« La présentation, lundi, de ce film très attendu a été bien accueillie » , observe-t-elle. Un film très « américain » , à la « sensibilité proche des Églises évangéliques ou anglicanes » , qui rejoint de toute évidence les préoccupations existentielles d’un monde parfois frénétique : « La question de Dieu traverse ce film tout du long. Plus généralement, reprend-t'elle, cette dimension passe mieux qu’il y a dix ans, elle est mieux admise par le public. » De la même façon, le long métrage du réalisateur italien Nanni Moretti, qui brosse avec humour les états d’âme d’un futur pape tétanisé par l’ampleur de sa charge, lui apparaît « sympathique » , alors qu’on pouvait s’attendre à quelque chose de « redoutable ». « Ici, l’Église est ridiculisée gentiment, avec un message très fort : on vous attend dans le monde. »
C’est évidemment le succès du chef-d’œuvre de Xavier Beauvois, présenté l’an dernier à ce même festival, qui signe cette évolution de façon spectaculaire, avec plus de 3 200 000 spectateurs. Et si ce triomphe s’explique sans doute pour partie par la forte mobilisation des catholiques, il semble évident que l’histoire des moines de l’Atlas a touché un public plus large. « Ce succès est révélateur d’une profonde soif spirituelle, analyse Vincent Mirabel (1), réalisateur et formateur en cinéma, lui-même croyant. Ce type de film fait du bien et comme il y a un public en attente d’œuvres profondément humaines, où la prière et l’amour se donnent à voir, sans prosélytisme. » Des hommes et des dieux serait selon lui de ces « rares films » qui laissent « affleurer l’âme »,«sans mâcher l’interprétation ».
Professeur de cinéma à l’Université catholique de Lyon, Michèle Debidour constate elle aussi que la « demande de sens » se fait plus insistante. Présidente du jury œcuménique qui a primé, en 2010, Des hommes et des dieux, à Cannes, elle s’étonne d’avoir été « extrêmement sollicitée » pour présenter ce film, et ce « pendant une longue période » , ce qui est « inhabituel » . Derrière cette quête spirituelle, c’est aussi l’Église, en tant qu’entité, qui se laisse redécouvrir.
« Les gens se sont éloignés du christianisme, dont ils gardent une certaine représentation, parfois caricaturale, souvent liée à l’enfance, analyse-t-elle. À travers ces films, ils le redécouvrent de l’intérieur, et sous différents aspects » : la vie monastique féminine dans De silence et d’amour (Michael Whyte, 2010), le pentecôtisme chez les Gitans dans Jimmy Rivière (Teddy Lussi-Modeste, 2011) ou encore les conséquences ppp
« Il y a un public en attente d’œuvres profondément humaines, où la prière et l’amour se donnent à voir, sans prosélytisme. »