02/04/2024
NOUS NE POUVONS PAS RESTER SILENCIEUX
Nous ne pouvons pas rester silencieux !
" : le communiqué du Vendredi Saint des Jésuites à propos de la situation à Gaza"
Nous ne pouvons pas rester silencieux !
Bientôt six mois de guerre à Gaza, et les armes ne se sont pas tues. Nous, les membres de la Compagnie de Jésus (les jésuites), comme tant d’autres catholiques, chrétiens, hommes et femmes de toutes confessions et non-croyants, refusons de nous taire. Nos voix continuent à s’élever en prière, en lamentations, en protestations contre la mort et la destruction qui continuent à régner à Gaza et dans d’autres territoires d’Israël/Palestine, et à se répandre dans les pays environnants du Proche-Orient.
Après les horreurs des attaques sur le sud d’Israël le 7 octobre 2023, les bombardements israéliens massifs sur la bande de Gaza et l’offensive terrestre qui a laissé la majeure partie de cette zone en ruines, nous assistons aujourd’hui à la famine et à la propagation de maladies à Gaza. Des dizaines de milliers de personnes sont mortes, près de 1.800 Israéliens, plus de 32.000 Palestiniens (sans compter ceux qui doivent encore être exhumés des décombres). En plus des vies fauchées, il y a des centaines de milliers de vies ruinées, de blessés, de sans-abri, de personnes affamées et atteintes par la maladie.
Les jésuites réitèrent leur engagement à ne pas rester silencieux. Il est inacceptable que, malgré les tentatives, près de six mois après le début de ce conflit, personne n’ait été en mesure d’arrêter les combats. Il est scandaleux que personne ne soit parvenu à obtenir que les habitants de Gaza mangent à leur faim. Il est honteux que personne n’ait pu demander de comptes aux belligérants. Malheureusement, nous constatons que la terre dite sainte est le théâtre d’un conflit qui se poursuit et qui s’envenime comme une plaie béante sur la face du Proche-Orient.
Engagés depuis des décennies parmi les communautés et les sociétés du Proche-Orient, les jésuites veulent dire qu’il n’est pas inévitable qu’il en soit ainsi. Le choix de la mort au détriment de la vie, de la vengeance au détriment de la réconciliation, de l’injustice au détriment de la justice, de l’intérêt personnel au détriment de la relation, de la violence au détriment du dialogue, est un choix et non pas une fatalité. D’autres choix sont possibles. Nous continuerons à nourrir le rêve d’un avenir différent, un avenir déjà prévu par les prophètes dans les Saintes Écritures. « De leurs épées, ils forgeront des socs, et de leurs lances, des faucilles. Jamais nation contre nation ne lèvera l’épée ; ils n’apprendront plus la guerre. » (Isaïe 2:4)
Nous joignons nos voix à celles du Saint-Père, le Pape François, qui a mis en garde à plusieurs reprises : « La guerre est une défaite ! Toute guerre est une défaite » (Angélus, 8 octobre 2023). Nous réitérons notre appel à un cessez-le-feu immédiat, à la libération des otages du 7 octobre, à des négociations et au lancement d’un processus qui assurera la liberté et la justice pour tous au Proche-Orient, seule voie vers une paix véritable.
29 mars 2024
Source : https://www.jesuits.global/fr/2024/03/29/nous-ne-pouvons-...
10:54 Publié dans CULTURE DE PAIX : Mouvement de la Paix, ..., FOI, RELIGION, SPIRITUALITE | Lien permanent | Commentaires (0)
19/01/2024
"JE PENSAIS VIVRE DANS UN PAYS ..."
GAUVAIN SERS est né le 30 octobre 1989 à Limoges. Cest un auteur-compositeur-interprète français
11/01/2024
PAPE FRANCOIS - AUDIENCE GENERALE DU 10 JANVIER 2024
Audience générale: la voracité compromet l'avenir de tous
Dans la poursuite de sa catéchèse sur les vices et les vertus, le Pape François a abordé, lors de l’audience générale mercredi la gourmandise, l’un des vices le plus «dangereux» qui est «en train de faire périr notre planète».
«Ce n'est pas ce qui entre dans l'homme qui le souille, mais ce qui sort de son cœur»
De prime abord, le Pape François invite à observer ce que fait Jésus, «son premier miracle, aux noces de Cana, révèle sa sympathie pour les joies humaines». Ceci se concrétise par le fait qu’il «veille à ce que la fête se termine bien et donne aux mariés une grande quantité de très bon vin». Ce qui fait comprendre que contrairement à Jean qui «mangeait ce qu'il trouvait dans le désert», Jésus est «au contraire le Messie que l’on voit souvent à table», mangeant avec les pécheurs. «Non seulement il est bienveillant à l’égard des pécheurs, mais il mange avec eux», relève le Saint Père. Ce comportement «suscite le scandale» pour les pharisiens. Ce geste de Jésus, poursuit le Pape, «démontre sa volonté de communier avec des personnes que tout le monde rejetait».
Pour le Souverain pontife, si «l’attitude de Jésus à l'égard des préceptes juifs révèle de sa pleine soumission à la Loi, il fait cependant preuve de compréhension à l'égard de ses disciples». Il défend les disciples lorsqu'ils «sont pris en flagrant délit de faim et qu'ils ramassent des épis le jour du sabbat», s’appuyant sur l’exemple du «roi David et ses compagnons, se trouvant dans le besoin, [qui] avaient eux aussi transgressé un précepte».
Un aspect important est ensuite soulever par François: «Jésus abandonne la distinction entre aliments purs et impurs». Pour Jésus, «ce n'est pas ce qui entre dans l'homme qui le souille, mais ce qui sort de son cœur». C’est pourquoi, explique le Pape, le «christianisme ne considère pas les aliments impurs». Dans ce sens, l’attention que nous devons avoir ne porte pas sur l’alimentation, mais plutôt «sur la relation que nous entretenons avec elle». Pour l’évêque de Rome, la relation «établie avec la nourriture doit être redécouverte et valorisée, surtout dans les sociétés dites de l'abondance, où se manifestent tant de déséquilibres et de pathologies». Le Pape déplore en dans ce sens à ces pathologies, «anorexie, boulimie, obésité», un ensemble de «troubles des comportements alimentaires» et le mauvais rapport à la nourriture auquel «la médecine et la psychologie tentent de s'attaquer».
Une maladie très douloureuse liées à des tourments de la psyché et de l'âme
En poursuivant, le Pape François condamne ces maladies qui sont «principalement liées à des tourments de la psyché et de l'âme». Le Saint Père, en mettant en parallèle «la prédisposition à l'équilibre ou à la démesure; la capacité de rendre grâce ou la prétention arrogante à l'autonomie; l'empathie de ceux qui savent partager la nourriture avec les nécessiteux ou l'égoïsme de ceux qui accumulent tout pour eux-mêmes», rappelle les «anciens Pères qui donnaient au vice de la gourmandise le nom de "gastrimargie", terme que l'on peut traduire par "folie du ventre». C'est un vice qui se greffe sur l'un de nos besoins vitaux, l’alimentation.
Pour le Pape François, «la gourmandise est peut-être le vice le plus dangereux qui est en train de faire périr la planète». Le péché de ceux qui cèdent devant une part de gâteau, ne fait pas grand mal mais le Pape condamne «la voracité avec laquelle nous nous déchaînons sur les biens de la planète, qui compromet l'avenir de tous».
Il exhorte à suivre les traces de Jésus en étant «des hommes et des femmes "eucharistiques", capables d'action de grâce, discrets dans l'utilisation de la terre», et de nous laisser guérir par l'Évangile «de la gloutonnerie personnelle et de la gloutonnerie sociale».
08:23 Publié dans CULTURE DE PAIX : Mouvement de la Paix, ..., FOI, RELIGION, SPIRITUALITE | Lien permanent | Commentaires (0)
22/12/2023
SOMNAMBULES !
Publié le
Le mot est à la mode. Il ne fait pas référence à un trouble du sommeil mais à un manque de lucidité politique et reprend le titre de l’ouvrage de l’historien australien Christopher Clark sur les causes de la Grande Guerre, paru voilà dix ans. Le somnambule (sleepwalker) marche dans son sommeil. Il est capable de faire des parcours et des gestes de la vie quotidienne sans en avoir la moindre conscience ; il dort. L’accusation de somnambulisme porte tantôt sur notre aveuglement face à la crise climatique, plus souvent sur le risque d’une déflagration mondiale dont la guerre en Ukraine serait le premier acte. Cette dangereuse marche sans conscience désigne aussi la torpeur des démocraties face au péril des autoritarismes qui les menacent en interne, Trump aux États-Unis, Rassemblement national en France pour ne prendre que deux exemples.
Les deux épisodes, quasiment jumeaux, de refus de financement du conflit ukrainien par un Congrès américain entravé par les Républicains ou au sommet européen sous la pression du Hongrois Viktor Orbán en sont l’inquiétante illustration. Il arrive aussi que les accusations se croisent. En France, la droite dure accuse de somnambulisme ceux qui, prétend-elle, laissent l’identité française se dissoudre face à l’afflux d’étrangers, la gauche retourne l’accusation envers ceux qui croient pouvoir refermer le monde et vivre dans l’entre-soi et l’autrefois.
Les métaphores autour du sommeil font florès. On traite certains de rêveurs – parfois doux. Une partie de la jeunesse se revendique « woke », éveillée. Et chacun veut éviter que l’avenir soit un cauchemar.
Noël nous parle aussi de veille. Dans l’Évangile de Luc, des bergers qui veillent dans les champs sont appelés à reconnaître le Sauveur promis à l’humanité. Dans celui de Matthieu, des sages étrangers qui surveillent le ciel voient se lever l’étoile d’un nouveau souverain et s’engagent dans un long périple pour le saluer. Et ce qu’ils trouvent n’est pas un rêve, juste un enfant au sein de sa mère, une vie minuscule porteuse de l’Espérance en majuscule.
Ainsi est la réalité, âpre et rude comme la paille de l’étable. Les chrétiens ne sont pas plus rêveurs que somnambules. Depuis plus de deux mille ans, ils tentent de vivre les yeux ouverts aux côtés d’un Dieu qui n’est pas dans les étoiles mais dans le frémissement de la chair.
Christine Pedotti
06/12/2023
MIGRATION
Migration ***
de Benjamin Renner et Guylo Homsy
Film d’animation américain, 1 h 22
Il aura réussi à mettre sa patte sur cette histoire de canards. Benjamin Renner, as du dessin animé à la française qui a coréalisé les excellents Ernest et Célestine(2012) etLe Grand Méchant Renard(2017), a su insuffler un supplément d’âme à une grosse production américaine en images de synthèse en 3D.
Migration est le nouveau long métrage des studios Illumination, filiale d’Universal basée à Paris, qui a fait déferler sur la planète des hordes de Minions, serviteurs gaffeurs d’un super-méchant au cœur d’artichaut (la saga Moi, moche et méchant). Au menu de ces films d’animation calibrés pour le marché mondial : animation soignée, saynètes burlesques et personnages attachants.
La recette est peu ou prou la même dans Migration, qui ne lésine pas sur les archétypes. Dans la famille Colvert, je demande le père, papa poule qui n’aime rien tant que sa paisible mare de Nouvelle-Angleterre, la mère, heureuse en couple mais qui rêve de sortir du « coin-coin » quotidien, le grand frère, ado sensible en mal de liberté, et la petite sœur, « canetonne » adorable mais froussarde. Sans oublier le grand-oncle, papy déplumé et bedonnant au franc-parler désarmant.
Hérons « perchés » et pigeons paranos
C’est lui qui convainc, bien malgré lui, son neveu de migrer vers d’autres latitudes pour passer l’hiver au chaud en Jamaïque. Le début d’une aventure, qui, comme on s’y attend, ne se passera pas comme prévu. Au détour d’escales parmi des hérons « perchés » ou des pigeons paranos, le récit enchaîne les gags inventifs et les chutes comiques.
Le plan de vol est connu d’avance, mais l’esthétique héritée de la BD franco-belge et le sens du timing comique de Benjamin Renner donne des ailes à ce gros-porteur taillé pour l’international. La palme revient à Gwen, dont les œillades destinées à attendrir ses parents dérideront les spectateurs les plus circonspects.
À l’image, tout est presque trop impeccable, animé avec délicatesse, mis en scène avec élégance, éclairé avec soin. Rien ne dépasse, sauf, heureusement, les quelques plumes sur la tête de nos héros. Leurs défauts et leurs maladresses donnent de l’épaisseur à cette histoire de famille qui voyage pour se réinventer. Quitte à y laisser quelques plumes.
• Non ! * Pourquoi pas ** Bon film *** Très bon film **** Chef-d’œuvre
05/12/2023
OÙ SONT LES HOMMES DE BONNE VOLONTE
OÙ SONT LES HOMMES DE BONNE VOLONTÉ ?
« Au même instant, il se joignit à l’ange une troupe de l’armée céleste, louant Dieu, et disant : Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et, sur la terre, paix aux hommes de bonne volonté. »
Cette année, qui n’aimerait voir devenir réalité cette louange à Dieu, telle que la rapporte saint Jérôme dans sa traduction des Évangiles ? Une attente que vienne la paix d’autant plus pressante que l’idée même de “paix dans le monde” n’a cessé de reculer ces derniers mois. Et s’est même éloignée de cet îlot si privilégié depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale qu’est le monde occidental.
« Paix aux hommes de bonne volonté », voilà le message fondamental de Noël. Un message où « homme » doit bien sûr être considéré comme un substitut du mot « humanité ». Et qui, selon l’Évangile de Luc (le seul à raconter en détail la naissance de Jésus), n’est exprimé ni par la Sainte Famille, ni par Dieu lui-même, mais par ces indéfinissables êtres dont raffole la tradition orientale : des anges.
« Paix aux hommes de bonne volonté » : chaque année, tous les chefs des religions chrétiennes le rappellent à Noël, même s’ils se résignent à l’exprimer comme un souhait, et non comme le constat d’une réalité.
« Paix aux hommes de bonne volonté » est aussi le message que chacun peut adresser à ses proches, à Noël. Car si ceux qui sont à la base ne le portent pas, pourquoi les chefs qui nous gouvernent le feraient-ils leur ?
Dans la traduction latine venant de saint Jérôme (347- 420), cette invite prononcée par les anges ne vise qu’une partie de l’humanité : celle des hommes de bonne volonté. Eux seuls peuvent espérer la paix. Pas les autres. Or, là où sévit la guerre, n’y a-t-il pas, notamment à certains niveaux de pouvoir, carence d’hommes de bonne volonté ? Où sont-ils aujourd’hui ceux qui, selon les définitions des dictionnaires, ont « le désir de bien faire » ? “Bien faire” non juste pour leur camp, mais dans l’intérêt de toutes et tous.
L’actualité démontre que ce n’est pas ce désir là qui motive bon nombre de prises de décisions dans les hautes sphères de nos sociétés, ou dans ces faits de la vie de tous les jours dont les récits nous atterrent.
Derrière tous ces drames, aucune bonne volonté. Or, sans bonne volonté, pas de paix. Quoique...
Les Évangiles ayant été l’objet de multiples traductions, toutes n’utilisent pas la même formule que saint Jérôme. Le Gloria que les fidèles récitent lors de l’eucharistie catholique reprend ainsi une traduction que l’on retrouve dans de nombreuses Bibles : « Paix sur la terre aux hommes qu’Il aime ». Une version inversée par rapport à celle de saint Jérôme, où les hommes n’ont pas besoin d’être de bonne volonté pour être aimés de Dieu. Mais où Celui-ci n’accorde sa paix qu’aux hommes qu’Il aime. Et pas aux autres. Choisira-t-Il ceux qui sont de bonne volonté ? Certains seront peut-être déçus...
Et puis, il y a ces traductions qui reformulent la parole des anges avec nuance, en leur faisant dire : « Paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime. » Une toute petite virgule, mais qui change tout !
Un élément de ponctuation grâce auquel la paix est accordée à tous les hommes, tandis que Dieu les aime tous. C’est cette version qui figure dans la nouvelle édition du missel romain, parue en 2021. Mais il faut bien reconnaître que, alors que la virgule apporte plus qu’une nuance, peu de monde semble y avoir accordé attention ...
Alors, la quête aux hommes de bonne volonté n’aurait-elle plus lieu d’être ? Que du contraire. Aujourd’hui, gagner la paix est vraiment l’affaire de tous et toutes, quelle que soit sa volonté personnelle.
Joyeux Noël ! Et surtout, paix sur terre !
Frédéric ANTOINE, Rédacteur en chef du magazine L’appel
19:53 Publié dans CULTURE DE PAIX : Mouvement de la Paix, ..., FOI, RELIGION, SPIRITUALITE | Lien permanent | Commentaires (0)
02/12/2023
LE DISCOURS DU PAPE FRANCOIS LU A LA COP28 DE DUBAÏ
Le cardinal PAROLIN lit le discours du Pape FRANCOIS à DUBAÏ le 2décembre 2023?
Le discours du Pape François lu à la COP28 de Dubaï
Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire Général des Nations Unies,
Illustres Chefs d’État et de Gouvernement,
Mesdames et Messieurs,
Je ne peux malheureusement pas être présent parmi vous comme je l’aurais voulu, mais je suis avec vous parce que l’heure est grave. Je suis avec vous parce que, aujourd’hui plus que jamais, l’avenir de tous dépend du présent que nous choisissons. Je suis avec vous parce que la dévastation de la création est une offense à Dieu, un péché non seulement personnel mais aussi structurel qui se répercute sur l’être humain, en particulier sur les plus faibles, un grave danger qui pèse sur chacun et risque de déclencher un conflit entre les générations. Je suis avec vous parce que le changement climatique est « un problème social global qui est intimement lié à la dignité de la vie humaine » (Exhort. ap. Laudate Deum, n. 3). Je suis avec vous pour poser la question à laquelle nous sommes appelés à répondre à présent : œuvrons-nous pour une culture de la vie ou bien de la mort ? Je vous le demande de manière pressante : choisissons la vie, choisissons l’avenir ! Écoutons le gémissement de la terre, prêtons attention au cri des pauvres, tendons l’oreille aux espérances des jeunes et aux rêves des enfants ! Nous avons une grande responsabilité : faire en sorte que leur avenir ne soit pas refusé.
Il est avéré que les changements climatiques en cours résultent du réchauffement de la planète, causé principalement par l’augmentation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, provoquée elle-même par l’activité humaine qui est devenue insoutenable pour l’écosystème au cours des dernières décennies. La volonté de produire et de posséder s’est transformée en obsession et a conduit à une avidité sans limite qui a fait de l’environnement l’objet d’une exploitation effrénée. Le climat devenu fou sonne comme une alarme pour stopper ce délire de toute-puissance. Reconnaissons de nouveau avec humilité et courage notre limite comme unique voie pour vivre en plénitude.
Qu’est-ce qui fait obstacle à ce chemin ? Les divisions qui existent entre nous. Mais un monde entièrement connecté, comme celui d’aujourd'hui, ne peut pas être déconnecté de ceux qui le gouvernent, avec des négociations internationales qui « ne peuvent pas avancer de manière significative en raison de la position des pays qui mettent leurs intérêts nationaux au-dessus du bien commun général » (Lett. enc. Laudato sì', n. 169). Nous assistons à des positions rigides, voire inflexibles, qui tendent à protéger des revenus de particuliers et ceux de leurs entreprises, en se justifiant parfois sur la base de ce que d’autres ont fait dans le passé, avec des renvois périodiques de responsabilité. Mais le devoir auquel nous sommes appelés aujourd’hui ne concerne pas le passé, mais l’avenir ; un avenir qui, qu’on le veuille ou non, sera à tous ou ne sera pas.
Les tentatives de faire retomber la responsabilité sur les nombreux pauvres et sur le nombre de naissances sont particulièrement frappantes. Ce sont des tabous auxquels il faut absolument mettre fin. Ce n’est pas la faute des pauvres puisque près de la moitié du monde la plus pauvre n’est responsable que de 10 % à peine des émissions polluantes, alors que l’écart entre les quelques riches et les nombreux démunis n’a jamais été aussi abyssal. Ces derniers sont en fait les victimes de ce qui se passe : pensons aux populations autochtones, à la déforestation, au drame de la faim, à l’insécurité en eau et alimentaire, aux flux migratoires induits. Les naissances ne sont pas un problème, mais une ressource : elles ne sont pas contre la vie, mais pour la vie, alors que certains modèles idéologiques et utilitaristes, imposés avec des gants de velours aux familles et aux populations, représentent de véritables colonisations. Il ne faut pas pénaliser le développement de nombre pays, déjà chargés de lourdes dettes économiques, mais considérer l’impact de quelques nations, responsables d’une dette écologique inquiétante envers tant d’autres (cf. ibid., nn. 51-52). Il conviendrait de trouver les moyens appropriés pour supprimer les dettes financières qui pèsent sur divers peuples, à la lumière également de la dette écologique qui leur est due.
Mesdames et Messieurs, je me permets de m’adresser à vous, au nom de la maison commune que nous habitons, comme à des frères et sœurs, pour nous poser la question suivante : quelle est la porte de sortie ? Celle que vous emprunter ces jours-ci : la voie qui consiste à être ensemble, le multilatéralisme. En effet, « le monde devient tellement multipolaire, et en même temps tellement complexe, qu’un cadre différent pour une coopération efficace est nécessaire. Il ne suffit pas de penser aux rapports de force […]. Il s’agit d’établir des règles globales et efficaces » (Laudate Deum, n. 42). Il est préoccupant, en ce sens, que le réchauffement de la planète s’accompagne d’un refroidissement général du multilatéralisme, d’une défiance croissante à l’égard de la Communauté internationale, d’une perte de la « conscience commune d’être [...] une famille de nations » (S. Jean-Paul II, Discours à la 50ème Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies, New York, 5 octobre 1995, 14). Il est essentiel de rétablir la confiance, fondement du multilatéralisme.
Cela vaut tant pour la protection de la création que pour la paix : ce sont les questions les plus urgentes et elles sont liées. Combien d’énergie l’humanité gaspille-t-elle dans les si nombreuses guerres en cours, comme en Israël et en Palestine, en Ukraine et en beaucoup d’autres régions du monde : des conflits qui ne résoudront pas les problèmes mais les accroîtront ! Combien de ressources sont-elles gaspillées en armements, qui détruisent des vies et ruinent la maison commune ! Je renouvelle une proposition : « Avec les ressources financières consacrées aux armes ainsi qu’à d’autres dépenses militaires, créons un Fonds mondial, en vue d’éradiquer une bonne fois pour toutes la faim » (Lett. enc. Fratelli tutti, n. 262 ; cf. saint Paul VI, Lett. Enc. Populorum Progressio, n. 51) et mettre en œuvre des activités qui favorisent le développement durable des pays les plus pauvres, en luttant contre le changement climatique.
Il appartient à cette génération de prêter l’oreille aux peuples, aux jeunes et aux enfants pour jeter les bases d’un nouveau multilatéralisme. Pourquoi ne pas commencer par la maison commune ? Les changements climatiques mettent en évidence la nécessité d’un changement politique. Sortons des ornières des particularismes et des nationalismes, ce sont des modèles du passé. Adoptons une vision alternative et commune : elle permettra une conversion écologique, car « il n'y a pas de changement durable sans changement culturel » (Laudate Deum, n. 70). J’assure en cela l’engagement et le soutien de l’Église catholique, active en particulier dans l’éducation et la sensibilisation à la participation commune, ainsi que dans la promotion des styles de vie, car la responsabilité est celle de tous, et celle de chacun est fondamentale.
Sœurs et frères, un changement de rythme qui ne soit pas une modification partielle de cap, mais une nouvelle façon de procéder ensemble, est essentiel. Si sur le chemin de la lutte contre le changement climatique, ouvert à Rio de Janeiro en 1992, l’Accord de Paris a marqué « un nouveau départ » (ibid., n. 47), il faut maintenant relancer la marche. Il est nécessaire de donner un signe d’espoir concret. Que cette COP soit un tournant : qu’elle manifeste une volonté politique claire et tangible, conduisant à une accélération décisive de la transition écologique, à travers des formes qui aient trois caractéristiques : qu’elles soient « efficaces, contraignantes et facilement contrôlables » (ibid., n. 59). Qu’elles soient mises en œuvre dans quatre domaines : l’efficacité énergétique, les sources renouvelables, l’élimination des combustibles fossiles et l’éducation à des modes de vie moins dépendants de ces derniers.
S’il vous plaît : allons de l’avant, ne revenons pas en arrière. Il est bien connu que divers accords et engagements pris « n’ont été que peu mis en œuvre parce qu’aucun mécanisme adéquat de contrôle, de révision périodique et de sanction en cas de manquement, n’avait été établi » (Laudato si', n. 167). Il s’agit ici de ne plus reporter mais de mettre en œuvre, et de ne pas seulement souhaiter, le bien de vos enfants, de vos citoyens, de vos pays, de notre monde. Soyez les artisans d’une politique qui donne des réponses concrètes et cohérentes, en démontrant la noblesse du rôle que vous jouez, la dignité du service que vous accomplissez. Car c’est à cela que sert le pouvoir, à servir. Il ne sert à rien de préserver aujourd’hui une autorité dont on se souviendra demain que pour son incapacité à intervenir quand cela était urgent et nécessaire (cf. ibid., n. 57). L’histoire vous en sera reconnaissante. De même que les sociétés dans lesquelles vous vivez, au sein desquelles règne une division néfaste entre “supporters” : entre les catastrophistes et les indifférents, entre les écologistes radicaux et les négationnistes du climat... Il ne sert à rien d’entrer dans des factions ; dans ce cas, comme pour la cause de la paix, cela ne mène à aucune solution. C’est la bonne politique qui est la solution : si le sommet donne un exemple concret de cohésion, la base en profitera, là où de très nombreuses personnes, en particulier des jeunes, s’impliquent déjà dans la promotion du soin de la maison commune.
Que 2024 marque un tournant. J’aimerais qu’un événement survenu en 1224, soit de bon augure. Cette année-là, François d’Assise composa le Cantique des créatures. Il le fit après une nuit passée dans la douleur physique, devenu complètement aveugle. Après cette nuit de lutte, porté dans son âme par une expérience spirituelle, il voulut louer le Très-Haut pour ces créatures qu’il ne pouvait plus voir, mais qu’il sentait être ses frères et sœurs, parce que provenant d’un même Père et partagées avec les autres hommes et femmes. Un sentiment inspiré de fraternité le conduisit à transformer la douleur en louange et la peine en engagement. Peu après, il ajouta un verset dans lequel il louait Dieu pour ceux qui pardonnent, et il le fit pour régler – avec succès ! - une querelle scandaleuse entre l’Autorité du lieu et l’évêque. Moi aussi je porte le nom de François, avec un ton vibrant d’une prière, je voudrais vous dire : laissons de côté les divisions et unissons nos forces ! Et, avec l’aide de Dieu, sortons de la nuit des guerres et des dévastations environnementales pour transformer l’avenir commun en une aube de lumière. Merci.
31/03/2022
RETOUR DE L'IMPENSABLE
Retour de l’impensable
Publié le 31 mars 2022 par Christine Pedotti
« A fame, bello et peste, libera nos Domine », « De la peste, de la faim et de la guerre, délivre-nous Seigneur. » Cette antique prière (XIVe siècle) trouve aujourd’hui une terrible actualité. Après le Covid et la guerre en Ukraine se profile désormais un risque de pénurie de blé, qui, certes, augmentera chez nous le prix de la baguette, des pâtes et des biscuits, mais qui, surtout, fait planer le spectre de la famine sur les pays dépendants des importations de blé, comme l’Égypte, la Tunisie, le Liban, l’Érythrée, la Somalie, le Yémen, ceux d’Afrique subsaharienne et, dans une moindre mesure, l’Algérie et le Maroc. L’Onu vient de lancer une alerte alimentaire concernant quarante-cinq pays…
Ce surgissement de fléaux que nous pensions avoir laissé à des temps anciens et obscurs nous laisse sidérés. Déjà, voilà deux années, la pandémie mondiale nous avait saisis d’impuissance. Contre un virus nouveau, malgré les progrès de la science et de la médecine, nous n’avons eu, tout d’abord, que la ressource du confinement – cesser de bouger pour arrêter la circulation du virus. En attendant un vaccin, qui, finalement, est venu.
Et voilà que, contre toute attente, et surtout contre toute raison, le chef d’État d’un grand pays, ordinairement inclus dans le concert des nations et ayant un siège permanent au Conseil de sécurité de l’Onu, décide de mener une guerre de conquête dite « de haute intensité » contre son voisin – un peuple frère – avec l’intention pure et simple de l’annexer. La résistance ukrainienne fait dérailler ses plans mais la violence de la frappe transforme un grand pays en champ de ruines, jette des millions de gens sur les routes, fait peser sur l’Europe la menace d’une frappe « non conventionnelle ».
Nous faisons face à l’impensable. Tout ce que nous pensions stable, intangible, devient friable, fragile. Quelle est l’issue ? Elle est tout à la fois simple et rude à mettre en œuvre et tient en trois mots : vivre, faire, aimer. Vivre, c’est-à-dire accueillir chaque jour comme une nouveauté et une espérance ; faire, parce que même le plus petit des gestes retisse de la fraternité, agir pour l’Ukraine, mais aussi pour notre voisin ou notre voisine, nos proches ; aimer, car chaque acte de réconciliation, de pardon, d’élan vers autrui fait barrage au mal et au malheur.
Christine Pedotti
10/03/2022
EN UKRAINE, TOUT UN PEUPLE S'EST LEVE
Publié le 10 mars 2022
par Laurent Grzybowski
Deux semaines déjà qu’un peuple s’est levé, résistant, refusant l’inévitable. Devant l’invasion de leur pays par la puissante armée russe, la bravoure et la détermination des Ukrainiens et des Ukrainiennes nous donnent une prodigieuse leçon de résistance. Plus les troupes surarmées de Vladimir Poutine avancent, plus les citoyens sont nombreux à s’engager. Étudiants, instituteurs, chauffeurs de taxi, ouvriers, artisans, un grand nombre d’entre eux ont répondu à l’appel de leur leader, Volodymyr Zelensky.
Se filmant lui-même dans les rues de Kiev, après avoir refusé sèchement toutes les propositions d’exfiltration – « C’est ici qu’ont lieu les combats, j’ai besoin de munitions, pas d’un taxi ! » –, l’ancien comédien devenu président a su galvaniser son peuple. À l’instar du maire de la ville, Vitali Klitschko, ex-champion du monde de boxe, cet homme prêt à sacrifier sa vie incarne le sentiment national ukrainien, portant la contestation vis-à-vis de la Russie à un niveau jamais atteint en Ukraine. Car, face à la brutalité de l’ennemi, la résistance ukrainienne est aussi spirituelle.
À Kiev, tandis que les hommes creusent des tranchées et s’apprêtent à combattre l’ennemi presque à mains nues, leurs épouses, mères et grands-mères s’activent dans des ateliers de fabrication de cocktails Molotov, l’arme des pauvres. Ce n’est pas la première fois que les Ukrainiens doivent se battre pour leur survie. Avec une méthode éprouvée, celle de la guérilla. Les soldats russes ne le savent peut-être pas encore, mais ils vont devoir faire face à une population soudée et déterminée qui va passer son temps à les harceler en leur infligeant de lourdes pertes. Il arrivera un moment où les bombes ne suffiront plus à assurer la victoire.
Il existe en Ukraine une forte tradition de guerre partisane, et le concept de « défense territoriale » – des groupes d’insurgés menant de petites actions sur un terrain qu’ils connaissent bien – y est profondément ancré. Au début de la guerre froide, après que le pays eut été libéré de l’occupation allemande, l’Armée insurrectionnelle ukrainienne a lancé une guérilla contre les Soviétiques. Elle n’a été définitivement vaincue qu’en 1953. S’il a été largement oublié par le reste du monde, ce conflit est bien présent dans les mémoires en Ukraine.
Dans cette lutte acharnée actuelle, les médias sociaux jouent un rôle majeur. À l’image de leur Président, produit talentueux de la télévision et donc orfèvre en la matière, les Ukrainiens en ont fait leur arme de mobilisation massive, à l’intérieur du pays comme à l’extérieur. Avec un avantage indéniable : la justesse même de leur cause. Quoi de plus légitime, en effet, que de s’opposer à un envahisseur dont le but affiché est de détruire un pays en tant qu’État indépendant ? En diffusant des scènes déchirantes de résistance devant l’armée russe par des citoyens aux mains nues, les Ukrainiens montrent qu’ils sont non seulement des héros, mais aussi des éveilleurs de consciences.
Laurent Grzybowski
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20/06/2020
STATUES DEBOULONNEES
STATUES DEBOULONNEES
Jacques GAILLOT, évêque de PARTENIA
Paris, 20 juin 2020
Une vague de colère a traversé des villes américaines, faisant tomber des statues de leur piédestal. Des manifestants s’en prenaient à ces personnages qui ont maintenu l’esclavage et développé la traite des Noirs pour s’enrichir. Ils ne méritaient pas d’être honorés.
A Washington, de vénérables portraits qui ornaient les couloirs du Capitole ont été décrochés : ces responsables politiques avaient cautionné l’esclavage.
L’Eglise épiscopalienne de New-York qui avait pris parti pour l’esclavage et s’était opposé à l’abolition, demande aujourd’hui pardon et surtout déclare faire réparation par une compensation financière aux descendants d’esclaves.
En 1865, la Constitution américaine abolissait définitivement l’esclavage. 155 ans après, on cherche toujours à réduire les inégalités raciales !
En France, le contexte est différent. On revisite aussi l’histoire. Mais il est plus difficile de déboulonner les statues !
Rêver reste à notre portée. Alors je rêve de déboulonner sans hésiter ma première statue : celle de Bugeaud, colonialiste, qui devint Gouverneur général de l’Algérie et pratiqua en plein 19ème siècle, la politique de « la terre brûlée » massacrant des milliers d’Algériens.
Qui mettre à la place ? Une femme, enfin ! Louise Michel. Elle a été l’âme de la commune de Paris en 1871, anticolonialiste et passionnée de justice. Cette femme courage a fait de la prison et a connu la déportation en Nouvelle Calédonie. Elle fut une résistante jusqu’au bout des droits humains pour tous.
S’il vous arrive de déboulonner des statues dans vos rêves, qui mettrez-vous à la place ?
Souhaitons que ce soit des femmes et des hommes anticolonialistes qui auront lutté pour les droits humains, l’égalité raciale, et le vivre ensemble.
Jacques GAILLOT, évêque de PARTENIA
Paris, 20 juin 2020