24/02/2022
VIEILLIR DANS LA DIGNITE
Publié le 21 février 2022 par Garrigues et Sentiers
Mgr Jacques GAILLOT
Nous sommes plus enclins à revendiquer notre droit à mourir dans la dignité, qu’à celui de vieillir dans la dignité. Mais la parution du livre Les Fossoyeurs sur la maltraitance dans certains Ehpad, remet au premier plan l’étape de la vieillesse.
Les révélations de cet ouvrage nous bousculent, nous révoltent, nous anéantissent.
Aujourd’hui, la vieillesse devient un cauchemar planifié, par une course au profit qui l’emporte sur toute autre considération.
Un être humain n’est pas réduit à ce qu’il produit ou à ce qu’il consomme. La dignité d’une personne n’est pas à vendre ou à louer. Elle ne doit jamais être perdue. Ces maltraitances attestent qu’on n’a pas su reconnaître la dignité de nos aînés, ni comprendre que ces personnes du grand âge avaient autant besoin de respect que de soins.
Si l’humain avait été placé au cœur de ces maisons de retraite, tout le monde serait gagnant.
Vieillir, n’est-ce pas tout perdre, au gré du temps ? La solitude est la grande épreuve. La tendresse, si nécessaire, semble disparue. Les personnes âgées ont un grand besoin de relations humaines chaleureuses où elles se sentent accueillies, écoutées, aimées. Nul ne survit au manque d’amour. N’en réchappe que la personne qui est aimée.
Il n’y a pas de vie perdue quand on aime. Une vie animée par l’amour est source de fécondité. C’est ainsi qu’on peut grandir en humanité. Se donner aux autres, n’est-ce pas le secret de ne pas mourir ?
Nous avons à bâtir une société où personne ne sera laissé de côté. Une société où les anciens auront leur place et seront honorés.
« Les personnes âgées sont comme les racines d’un arbre : si elles sont exclues de la société, l’arbre meurt » (pape François)
Jacques Gaillot
Source : https://nsae.fr/2022/02/12/vieillir-dans-la-dignite/?utm_...
13/02/2022
ESPERANCE
LA CROIX le 13/02/2022 à 19:40I Isabelle De Gaulmyn rédactrice en chef
Tous les ingrédients étaient là. Une banlieue où la crise industrielle a laissé sur le carreau de nombreuses familles d’origine étrangère ; des jeunes désœuvrés, radicalisés par un islam importé ; une petite église vide, avec un vieux prêtre et quelques religieuses, peinant à conserver la flamme du christianisme… L’assassinat du père Hamel aurait pu donner raison à tous ceux qui nourrissent à longueur de discours la théorie du grand remplacement, du choc des civilisations, de la fin du christianisme et du déclin. Guidé par les propagandistes de Daech, c’est précisément ce que ce jeune de Saint-Étienne-du-Rouvray qui n’avait pas 20 ans, Adel Kermiche, a voulu provoquer en tuant le vieux prêtre : que tout le pays s’embrase.
Sauf que la « petite » église se révéla être plus solide qu’il n’y semblait, soutenue par une institution catholique capable de tenir un propos apaisant. Que l’opinion publique a reconnu dans ce vieux prêtre, fils de cheminot, une part d’elle-même. Que le maire communiste fut au côté de l’évêque. Que le président socialiste François Hollande soucieux de laïcité n’hésita pas une minute pour signifier que l’assassinat du prêtre touchait au sacré de la République. Et que les musulmans furent nombreux à manifester leur solidarité aux catholiques qui surent les accueillir.
Certains se plaisent aujourd’hui à attiser les fractures d’une société fragilisée. Dans cette drôle de campagne électorale, ils n’hésitent pas à ressasser des discours de haine opposant les Français entre eux, et à profiter du sentiment d’insécurité pour caricaturer la communauté musulmane. Le procès des assassins du père Hamel, qui commence ce lundi, est l’occasion de leur renvoyer une autre image de la France. Celle d’un pays résilient, d’un peuple capable de se retrouver sur ses valeurs. Celle d’une République qui tient bon. Et qui sait encore cultiver l’espérance.
https://www.la-croix.com/Religion/Proces-lattentat-Saint-...
15/01/2022
LES MIMI CRA CRA DE LA POLITIQUE
Publié le
.C’est un personnage qui a bercé bien des enfances, une petite fille délurée qui n’aime rien tant que sauter à pieds joints dans les flaques pour éclabousser tout le monde, parce que « Mimi Cracra, l’eau, elle aime ça », et surtout l’eau un peu boueuse, même si elle finit la journée dans un bon bain. Le Président doit avoir des envies d’enfance rentrées – de l’inconvénient d’avoir été bon élève –, parce que sa saillie dans Le Parisien sur son envie d’« emmerder » les non-vaccinés relève d’une joie de Mimi Cracra, et que, comme les sales gosses, il répète le mot trois fois, comme s’il gobait des marshmallows ou se gavait de fraises Tagada. Comment s’étonner dès lors que Valérie Pécresse, en réponse, veuille ressortir le « Kärcher » de la cave pour le contrer…
Alors, non, un président ne devrait pas dire ça, même si, comme beaucoup de nos compatriotes, il le pense. L’honneur de la parole publique devrait demeurer de ne pas dire tout haut ce que nous pensons tout bas. Pendant longtemps, seuls les leaders populistes, tel Jean-Marie Le Pen, se vantaient de faire l’inverse. Emmanuel Macron inaugure une étrange chimère ; le populisme d’extrême centre.
De fait, il apparaît de plus en plus clairement que cette campagne électorale est en train de se dérouler à un niveau sonore tel qu’il va falloir être celui ou celle qui crie le plus fort pour être entendu.
Fabien Roussel, le candidat communiste, a certainement été le premier étonné de déclencher une houle médiatique pour avoir déclaré que la gastronomie française, c’était « un bon vin, une bonne viande, un bon fromage ».
Reste-t-il un espace pour un discours politique raisonnable, sensé ? Hélas, on ne voit pas comment l’horizon pourrait se dégager. Du côté gauche, à défaut de buzz, on n’entend guère que du brouhaha, le bourdonnement sourd de trop nombreuses candidatures.
La grande affaire de La Primaire populaire est en train de devenir un piège tragique et les valeureux jeunes gens qui entament une grève de la faim pour exiger une candidature unique, pour être courageux, n’en sont pas moins dans une irréalité peu compatible avec le nécessaire réalisme et le pragmatisme politique. Mais du moins sauvent-ils la morale face au cynisme. À ce titre, ils méritent notre estime.
Christine Pedotti
Photo : Jacques Paquier (CC BY 2.0)
12/01/2022
VOEUX POUR 2022- VOICI L'HEURE DE SORTIR DE VOTRE SOMMEIL
Bernard Ginisty, philosophe. Il a été co-fondateur de Démocratie et spiritualité, et directeur de Témoignage chrétien.
Vœux pour 2022 : « Voici l’heure de sortir de votre sommeil »
En ce début d’année, nous échangeons traditionnellement des « vœux ». Le mot « vœu », dans la langue française, signifie deux attitudes contradictoires. L’une traduit la futilité de ce qu’on appelle des « vœux pieux » formulés sans que leurs auteurs s’interrogent sur ce en quoi ils sont concernés par la réalisation de ce qu’ils « souhaitent », laissant ce soin à un « bon dieu ». La seconde exprime l’engagement de ceux qui se « vouent » à une cause.
L’année 2022, par l’ampleur des crises qui s’annoncent aura besoin, de notre part d’autre chose que des « vœux pieux ». Pour Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International et ancienne rapporteuse spéciale des Nations-Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, « nous sommes dans une crise des normes, qui se traduit par des attaques contre la dignité humaine, et même contre l’idée d’égalité entre les êtres humains. La mort de réfugiés et de migrants est devenue monnaie courante, presque quelque chose d'acceptable, comme si leur vie avait moins de valeur que la nôtre. La crise aigüe que nous traversons pourrait conduire nos sociétés à des situations du type 1939. Je m’interroge souvent : serons-nous la génération des années 1930 ou celle des années 1948, qui a rédigé la Déclaration universelle des droits de l’homme ? »
Par ailleurs, il faut bien constater l’inquiétante évolution des États-Unis d’Amérique qui menace l’équilibre mondial. C’est ce que constate l’économiste Jeffrey Sachs, professeur à l’université Columbia (New York) et président du réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies : « Les États-Unis sont devenus un pays de riches, par les riches et pour les riches, refusant toute responsabilité politique pour les dommages climatiques qu’ils imposent au reste du monde. Les clivages sociaux qui résultent de cette situation ont conduit à une épidémie de « morts du désespoir » (notamment par surdose médicamenteuse et suicides), à une baisse de l’espérance de vie (avant même la pandémie due au Covid-19), à une hausse de cas de dépression chez les jeunes. Sur le plan politique, ces profonds désordres mènent vers divers chemins – le plus inquiétant étant celui de Donald Trump, son faux populisme et son vrai culte de la personnalité. Servir les riches tout en distrayant l’attention des pauvres avec la xénophobie, les guerres culturelles et les coups de menton de l’homme fort est peut-être le plus vieux truc du manuel du démagogue, mais il fonctionne encore étonnamment bien ». Kathleen Belew, professeur d’histoire américaine à l’université de Chicago écrit : « Ma grande interrogation est de savoir à quel point ces groupes du white power vont réussir à capter un auditoire dans un cercle concentrique plus large. (…) Plusieurs participants à l’insurrection du 6 janvier ont été élus à des fonctions officielles sous la bannière du parti républicain »
Cette évolution des États-Unis d’Amérique ne doit pas nous éviter d’analyser les faiblesses de la France et plus généralement de l’Union Européenne. Évoquant les cinq années où elle a été rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les exécutions extra judiciaires, Agnès Callamard constate : « Je n’ai pas trouvé que la France jouait un rôle particulièrement important ou positif en matière de droits humains. Les autorités françaises se montrent timorées dès qu’il s’agit de l’Arabie saoudite et de la Chine, privilégiant les exportations, les intérêts économiques et géopolitiques à la défense des droits »
On a souvent reproché aux chrétiens, parfois à juste titre, de se réfugier dans un arrière monde qui les éloigne des combats pour l’homme ! Mais comment ne pas voir dans la course à l’argent, le désenchantement individualiste, les haines ethniques et raciales, les injustices établies, des “ opiums du peuple ” autrement dangereux ? La Résurrection manifeste que la force vivante en tout homme est plus radicale que ses peurs, ses échecs et ses enfermements. Elle indique, suivant l’étymologie du mot Pâques, que l’aventure humaine se réalise non dans la possession, mais dans le passage. Se vautrer dans la quête d'une intériorité toujours plus affinée est un terrain où prospèrent les idoles. Si Dieu est “ passant ”, c'est qu’il n'est pas “ présent ”. C’est dans le visage de ce qui nous est étranger que nous avons quelques chances de saisir sa trace. Au jeune homme riche qui, en règle avec toutes les lois, veut “ posséder ” la vie éternelle, le Christ propose “ d’entrer dans la vie ” en devenant étranger à ses biens (Mt 19, 1-22). Aux opiomanes tentés d’enfermer l’aventure humaine dans l’avoir, le pouvoir ou la sécurité des appartenances, le message pascal annonce : “ Voici l’heure de sortir de votre sommeil ”
11/01/2022
LES INQUIETUDES DU PAPE SUR L'ETAT DU MONDE
Le pape François a développé, lundi 10 janvier, devant les diplomates de toute la planète, ses préoccupations pour le monde. Parmi elles : les vaccins, les migrants et la détention d’armes. Pour la première fois, il s’est montré préoccupé par la « cancel culture ».
Rome De notre envoyé spécial permanent - Loup Besmond de Senneville
C’est le grand rendez-vous du début d’année au Vatican. Le pape François s’est longuement exprimé, lundi 10 janvier, lors de la traditionnelle cérémonie de vœux adressés à tous les ambassadeurs accrédités près le Saint-Siège. Durant un discours fleuve, il a dressé un vaste état du monde et a adressé aux 183 États représentés devant lui une vigoureuse exhortation à agir, dans le contexte critique de la pandémie.
Car c’est bien des autorités politiques et sanitaires que dépend la distribution des vaccins, dont François a estimé que, même s’ils ne sont pas « des outils magiques de guérison », ils constituent « la solution la plus raisonnable pour la prévention de la maladie ». Depuis la salle des Bénédictions, au cœur du Palais apostolique, il a d’ailleurs fustigé, en la matière, les « informations infondées » et les « faits mal documentés » qui constituent des « idéologies » en rupture avec « la réalité objective des choses ».
« Un engagement global de la communauté internationale est nécessaire pour que l’ensemble de la population mondiale ait un accès égal aux soins médicaux essentiels et aux vaccins », a-t-il affirmé.
Insistant sur l’importance de l’éducation dans cette période troublée, il a redit sa « douleur » de constater que des abus sur mineurs avaient eu lieu « dans divers milieux éducatifs ». « Il s’agit de crimes sur lesquels il faut avoir la ferme volonté de faire la lumière en examinant les cas individuels, afin d’établir les responsabilités, de rendre justice aux victimes et d’empêcher que de telles atrocités ne se reproduisent à l’avenir. »
Autre demande adressée aux États, de la part d’un pape qui est apparu inquiet pour le monde : celle d’accueillir les migrants. Le thème est d’autant plus présent chez lui qu’il estime, comme il l’avait exprimé lors de son voyage en Grèce et à Chypre, début décembre, que le sort des migrants est frappé par l’indifférence générale. S’il s’est dit « conscient des difficultés que rencontrent certains États face à des flux humains considérables », il a aussi affirmé que ces réticences ne pouvaient être le prétexte à une fermeture totale : « Il y a une nette différence entre accueillir, même de façon limitée, et repousser totalement. »
Pour le pape, la solution aux crises migratoires et climatiques se trouve dans une réponse globale, portée par des instances multilatérales. Mais la diplomatie multilatérale, grande priorité du Saint-Siège, fait l’objet d’un affaiblissement réel ces dernières années, et du « manque d’efficacité de nombreuses organisations internationales ». L’une des raisons de cette carence ? « Une forme de colonisation idéologique », a répondu François. Pour la première fois, le pape a évoqué la « cancel culture » (culture de l’annulation), qu’il a définie comme une « pensée unique contrainte à nier l’histoire ». « Au nom de la protection de la diversité, on finit par effacer le sens de toute identité, avec le risque de faire taire les positions qui défendent une idée respectueuse et équilibrée des différentes sensibilités », a fustigé le pape.
En décembre, François avait critiqué un guide interne de la Commission européenne, dans lequel il était notamment recommandé de ne plus souhaiter « Joyeux Noël », afin de respecter les différentes traditions religieuses. Un épisode que le pape n’a toutefois pas directement nommé, fidèle à la tradition de la diplomatie du Saint-Siège de ne pas mettre en cause un organisme ou un État de manière frontale. On peut aussi relever l’absence de la mention de deux États, avec lesquels les relations demeurent particulièrement délicates : la Chine et la Russie.
Pour autant, le pape n’a pas évité d’autres sujets difficiles, et à ses yeux prioritaires, comme la détention d’armes. « On a parfois l’illusion que les armements ne remplissent qu’un rôle dissuasif contre d’éventuels agresseurs, a-t-il averti. L’histoire, et malheureusement aussi l’actualité, nous enseignent que ce n’est pas le cas. Celui qui possède des armes finit tôt ou tard par les utiliser. » Une inflexion claire dans la doctrine, qui a longtemps condamné l’utilisation des armes, tout en reconnaissant à la dissuasion une forme de légitimité.
Paroles
« Son diagnostic sonne vraiment très juste »
Patrick Renault
Ambassadeur de Belgique près le Saint-Siège
« Je suis frappé par les propos du pape sur plusieurs points. D’abord, sa condamnation des fausses rumeurs sur les vaccins est claire. Cela peut avoir un impact important sur ceux qui aujourd’hui, notamment en dehors d’Europe, utilisent des arguments religieux pour tenir des discours anti-vaccination. Ensuite, son diagnostic sur le multilatéralisme et la crise des organisations internationales sonne vraiment très juste. Lorsqu’il parle du manque d’efficacité de ces organismes, on ne peut qu’être d’accord. Enfin, il exprime une réelle inquiétude sur le fait que le processus de paix entre Israël et Palestine n’ait pas avancé et il promeut des négociations avec l’Iran pour un accord sur le nucléaire. C'est le soutien fort et très significatif."
Recueilli par Loup Besmond de Senneville (à Rome)
23/12/2021
DOUCE FRANCE
DOUCE FRANCE
Nous espérions qu’en 2021 nous en aurions fini avec le « maudit virus ». Hélas, les perspectives pour 2022 demeurent inquiétantes, même si l’efficacité de la vaccination est grande et atténue les effets des vagues épidémiques. Le virus circule à vive allure et ne cesse de muter. Si les pays développés ont une forte couverture vaccinale, des pans entiers du reste du monde se heurtent à la fois à la non-disponibilité du vaccin, à des problèmes logistiques considérables et à des hostilités vaccinales extrêmement vives. Tout cela mêlé peut nous faire craindre que 2022 soit encore une année « Covid ». Pourtant, à l’aube de cette nouvelle année, plutôt que de nous laisser aller au découragement, prenons le temps de nous réjouir. Oui, osons nous dire qu’il fait bon vivre en France. Je sais tout ce qui peut être objecté à ces mots, mais prenons le temps de regarder ce qui va, ce qui est beau, bon et juste, afin d’y trouver la force de le défendre, d’entreprendre d’autres conquêtes et de le partager plus largement.
Reparlons donc du virus, des soins et des vaccins, et réjouissons-nous de vivre dans un pays capable de soigner tout le monde, sans exclure qui que ce soit pour des raisons financières. Vivre en France, même sans titre, ouvre le droit à la santé et à des soins de qualité. S’il faut se battre pour sauver une cathédrale, que ce soit celle-ci, celle de la « sécu » pour tous et toutes. Bien sûr, on peut – et il faut – faire encore mieux, rénover l’hôpital et l’offre de soins, mais ne boudons pas ce que nous avons.
Oui, le système de protection sociale – maladie, chômage, famille, retraite, logement, handicap – est lourd et complexe et peut et doit être amélioré, mais il existe et il fonctionne. Et c’est notre honneur de ne le soumettre qu’à des conditions de ressources et non d’origine.
Oui, l’Éducation nationale est une pesante machinerie qui peut et doit être améliorée, mais elle accueille tous et toutes, de la maternelle à l’université, gratuitement ou à très faible coût comparé à bien d’autres pays.
Oui, tant la justice que la police pourraient mieux fonctionner, mais, même cahin-caha, quoi qu’on en dise, la France est l’un des pays les plus sûrs et les plus paisibles au monde.
Réjouissons-nous de ce que nous avons, fruit des luttes, des conquêtes, des révolutions, des réformes. Et protégeons-le jalousement ; c’est la véritable identité de la France.
Publié le
09/12/2021
LA FRANCE, LA FRANCE
Cette fois, nous y sommes ou presque ; les « petits chevaux » sont presque tous alignés sur la ligne de départ pour la grande course présidentielle. Il manque certes le président sortant, mais il ne fait guère de doute qu’il sera candidat à sa succession et, à date, le prétendant le plus sérieux pour le titre, de sorte que tous les autres sont pour l’instant des challengers.
Que dire sinon gémir de tristesse devant l’affligeant émiettement de la gauche ? Au-delà de son incapacité dramatique à présenter un candidat ou une candidate ayant un espoir de figurer au second tour, sa faiblesse et sa dispersion ne lui permettent même pas de peser sur le positionnement d’Emmanuel Macron, qui cherchera plutôt à rattraper des électeurs et des électrices fuyant une droite tendue vers l’extrême. Car c’est bien à droite que ça se passe, une droite dont les différentes nuances n’atténuent pas les couleurs criardes et violentes. Marine Le Pen se retrouve bizarrement à incarner la droite populaire du gros rouge qui tache et du (faux) « bon sens près de chez vous ». Sa bonhomie en deviendrait rassurante comparée à la figure de Zemmour, tout recuit de ressentiment, en appelant à une France pétaino-pompidolienne fantomatique, une France issue de l’accouplement improbable de Dupont Lajoie et de Brasillach. Il a été rejoint, sans grande surprise, par les militants de Sens commun – rebaptisé Mouvement conservateur en 2020 –, une formation droitière issue du combat contre le mariage pour tous.
La campagne de désignation du champion des Républicains quant à elle a d’abord montré des candidats infléchissant leur propos sur des positions de plus en plus nationalistes, xénophobes et autoritaires. Le premier tour a placé Éric Ciotti en tête et, s’il s’est finalement incliné devant Valérie Pécresse, il a quand même atteint 40 % des suffrages en ne cachant pas sa proximité avec l’autre Éric. Il n’a d’ailleurs pas attendu vingt-quatre heures pour peser sur la vainqueure en prétendant lui dicter des choix de campagne aussi radicaux qu’un « Guantánamo à la française » dans la lutte antiterroriste.
Que reste-t-il de la France dans tous ces délires ? La France « millénaire » et fantasmatique de certains est-elle une autre France que celle des Lumières, de l’universalisme, des droits humains, de la liberté, de l’égalité, de la fraternité et de la laïcité ?
Christine Pedotti
01/12/2021
MIGRANTS, CHANGER DE VISION
Chronique
Si loin, si proches
Migrants, changer de vision
Jean-Christophe Ploquin, rédacteur en chef à La Croix
Pendant quelques jours, on a pu croire que l’Europe allait être envahie. Ce n’était pas les Huns ni l’Armée rouge mais quand même « la plus grande tentative de dé-stabilisation de l’Europe » depuis la guerre froide, selon le premier ministre polonais Mateusz Morawiecki. Des milliers de migrants attendaient en Biélorussie de pouvoir franchir la frontière. Pour les en empêcher, Varsovie a bouclé la zone, déployé plusieurs milliers de soldats, gardes-frontières et policiers. Des clandestins ont été débusqués jusque dans les hôpitaux.
Ce flux migratoire ne devait rien au hasard. Les Européens ont établi que la Biélorussie avait délibérément acheminé les migrants à cette frontière, après avoir délivré des visas et affrété des vols à partir de capitales du Moyen-Orient. L’autocrate Alexandre Loukachenko se vengeait ainsi des sanctions infligées à son régime depuis l’élection présidentielle truquée d’août 2020, qu’il affirme avoir emportée. Ses services ont activé des réseaux de passeurs au Kurdistan, en Syrie, au Liban, faisant miroiter un accès facile vers l’Allemagne, nouvel eldorado. Les mafias ont récolté une manne en suscitant l’élan d’hommes et de femmes jeunes, parfois avec enfants, désireux de fuir un avenir désespérant. La Pologne affirme avoir enregistré au total plus de 34 000 tentatives de franchissement de sa frontière, avec un pic en octobre. La Biélorussie a évoqué le chiffre de 7 000 migrants sur son sol, dont plusieurs centaines ont été depuis rapatriés. Selon les ONG, 11 personnes sont mortes durant la traque, de froid ou de maladie.
L’Union européenne a fini par faire reculer le potentat de Minsk. La compagnie aérienne biélorusse va être punie et la Commission propose un texte visant à pouvoir sanctionner à l’avenir « les sociétés complices de traite et de trafic de migrants ».
Fin de l’épisode ? La question des migrants est récurrente depuis vingt ans mais rarement elle aura pu être appréhendée avec autant de facilité. Les spectateurs que nous étions en ont perçu toute la dramaturgie : comme dans une tragédie grecque, la raison d’État a broyé les destinées humaines. Mais comment ne pas en garder un profond goût d’amertume. Quoi ? Étions-nous vraiment menacés par ces milliers de personnes cherchant un avenir meilleur ? N’était-il pas possible de trouver des solutions plus respectueuses de la dignité humaine ?
La question migratoire est difficile et malheureusement dans une impasse à l’échelle européenne. La plupart des gouvernements sont tétanisés par la dimension politique de l’enjeu. L’Union ne réussit pas à dégager de nouvelles formes de solidarité entre ses membres. Elle parvient malgré tout à peser sur ses voisins en vue de limiter les flux migratoires et de faire respecter ses frontières. Mais elle est sur la défensive et manque d’assurance. Une nouvelle stratégie nécessiterait de travailler sur les représentations que les citoyens ont des migrants. Une attitude plus confiante dans la rencontre et l’altérité devrait être stimulée, notamment en observant le passé. L’Europe a toujours été un continent d’arrivées et de départs. C’est ce que raconte l’exposition « Picasso l’étranger », au Musée national de l’histoire de l’immigration, à Paris (1). L’exilé catalan est devenu une figure mondiale de l’art en France. Picasso n’a pourtant jamais été naturalisé français et il a, de ce fait, longtemps vécu dans l’insécurité.
(1) Jusqu’au 13 février. histoire-immigration.fr
29/11/2021
FAIM ET DIGNITE : L'ETAT DE LA PAUVRETE EN FRANCE
Le Secours Catholique-Caritas France a publié jeudi 18 novembre son rapport statistique annuel État de la pauvreté en France 2021. Constats et analyses sur la précarité issus de l’observation sur l’ensemble du territoire national de plus de 38 800 situations (sur les 777 000 personnes accueillies en 2020).
Pour son rapport 2021 qui alerte sur la dégradation du niveau de vie des plus pauvres, l’association a complété son étude d’une enquête approfondie sur la question spécifique de l’aide alimentaire et de l’accès à l’alimentation, à travers une enquête menée auprès de 1 088 ménages qui ont eu recours à l’aide alimentaire d’urgence allouée par le Secours Catholique durant le premier confinement, de mars à mai 2020.
La crise sanitaire a agi comme un puissant révélateur d’une insécurité alimentaire déjà bien ancrée pour des millions de Français. La pandémie de Covid-19 a déstabilisé des situations budgétaires déjà très serrées. Quand les maigres ressources baissent alors que les dépenses augmentent (du fait de la fermeture des cantines scolaires ou de l’augmentation des dépenses d’électricité), les privations deviennent dès lors quotidiennes.
Le Secours Catholique rappelle que la précarité alimentaire est liée à une unique constante : l’insuffisance et l’instabilité des ressources.
22 % des ménages accueillis ne disposent d’aucunes ressources financières.
1/3 des ménages accueillis n’ont pas accès à un logement stable.
27 % ne mangent pas pendant 1 journée entière ou davantage.
Pour télécharger le rapport, cliquer sur :
https://www.secours-catholique.org/sites/scinternet/files/publications/rs21.pdf
25/11/2021
VOYAGE AU VATICAN
Les visites de chefs d’État au Vatican sont toujours un étrange objet diplomatique et politique. On se souvient que celle de Mikhaïl Gorbatchev en décembre 1989 entérina la chute du mur de Berlin et la fin de la guerre froide. À cette occasion, de façon très singulière, la diplomatie soviétique accorda le point au pape en le canonisant vainqueur du communisme… une façon habile de ne pas le donner aux États-Unis. On n’oubliera pas non plus le visage fermé, voire hostile, de François à l’égard de Donald Trump ; il est des silences renfrognés plus ravageurs que les mots. Hélas, nous avons encore honte de la burlesque visite de Nicolas Sarkozy accompagné de l’humoriste Bigard. Plus récemment, du côté français, la rencontre avec François Hollande fut un peu guindée et protocolaire, tandis que la visite d’Emmanuel Macron sembla plus cordiale et familière. On en déduisit qu’entre le pape disciple d’Ignace et l’ancien élève des jésuites s’était trouvée une communauté de culture.
Les conditions dans lesquelles le président français se rend une nouvelle fois au Vatican en cette fin de novembre sont plus étonnantes. D’abord parce que, de tradition, le pape s’abstient de recevoir des dirigeants en campagne ou près de l’être. Ensuite, parce que l’émoi soulevé par le rapport de la Ciase sur les violences sexuelles et leur dissimulation ne peut laisser ni le pape ni le chef de l’État indifférents. Voilà trois années, nous plaidions en faveur d’une enquête menée de façon indépendante, suggérant une commission parlementaire au motif d’un trouble à l’ordre public qui subvertissait les règles ordinaires de la séparation des Églises et de l’État.
Les conclusions de la Ciase confirment notre inquiétude. Les religieux et religieuses, puis les évêques ont reconnu leur responsabilité institutionnelle. Ils entrent dans un processus de réparation par le biais de l’écoute et de l’indemnisation des victimes. Mais il reste une lourde interrogation quant à la gestion des risques. Quels changements doivent être engagés dans l’organisation des institutions afin de mettre les enfants à l’abri ? Les 330 000 victimes agressées dans le cadre des activités du catholicisme ne sont pas des sous-citoyens parce que catholiques. Espérons que cette grave question sera au centre de l’entretien qui se tiendra au Vatican le 26 novembre.
Publié le