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19/05/2022

PLEURE JERUSALEM

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Pleure, Jérusalem !

Publié le

La scène est insupportable : d’un côté un groupe de policiers, casqués et lourdement protégés, tout de noir revêtus, matraque à la main, de l’autre un cercueil porté à bout de bras par des hommes en simple tee-shirt. Le cercueil progresse, nous sommes dans la cour de l’hôpital Saint-Joseph à Jérusalem – établissement de soins fondé en 1954 par des Françaises, les sœurs de Saint-Joseph de l’Apparition. Et puis les policiers chargent, repoussent les porteurs du cercueil à coups de matraque. Les hommes reculent, les policiers continuent à frapper du poing et du pied, le lourd fardeau vacille et plonge en avant. Les porteurs qui se tiennent à l’arrière se cramponnent et retiennent le coffre. Finalement, ils ne le laisseront pas échapper. Dans un immense désordre, le cercueil est conduit jusqu’à la Vieille Ville, où la messe des obsèques de la journaliste américano-palestinienne Shireen Abu Akleh, tuée d’une balle dans la tête en plein travail en Cisjordanie, est célébrée à la cathédrale Notre-Dame-de-l’Annonciation (de rite grec melkite catholique) à la porte de Jaffa.

Certes, les horreurs dévoilées lors du retrait des troupes russes en Ukraine nous « habituent », mais quand même… Attaquer un cercueil, une procession funéraire a quelque chose de profondément inhumain. Cette scène éclaire d’une lumière crue l’impasse dans laquelle sont plongés les Palestiniens, privés de leurs droits élémentaires – et en particulier celui d’être protégés par la loi contre l’arbitraire –, mais aussi les Israéliens. Quand la simple perspective que soient déployés des drapeaux palestiniens, que soient entonnés des chants nationalistes déclenche un tel niveau de rage du côté des forces de l’ordre israéliennes, que reste-t-il d’un espoir de concorde ? La violence faite aux morts est pire que celle qui est faite aux vivants car elle est symbolique. Elle s’attaque à la mémoire, celle des vivants, celle des morts, celle de ceux qui viendront ensuite. Elle s’étend d’âge en âge comme un poison, une contagion.

La Bible fait devoir de ne pas laisser le corps des condamnés ou des ennemis exposé après le coucher du soleil ; pour donner une chance au jour nouveau… Aujourd’hui, quelle chance reste-t-il pour la paix en Israël-Palestine ?

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Photo : Osps7CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons

16/05/2022

CHARLES DE FOUCAULT, FRERE UNIVERSEL

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Publié le par Garrigues et Sentiers

 

Charles de Foucauld, frère universel 

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Le 15 mai a eu lieu la canonisation de trois Français : César de Bus (fin du 16e siècle), fondateur d’une congrégation, Marie Rivier (18e siècle) qui a investi dans le champ éducatif, et Charles de Foucauld, mort en 1916.

Saintes, tout simplement

Il y a quelques années, à Rome, un cardinal français chargé par le pape de renouer avec Cuba,  me rapporta une discussion avec Fidel Castro. Celui-ci, dont la mère venait de mourir, lui demanda : « Qu’est-ce qu’un saint pour l’Église catholique ? ». « C’est compliqué, répondit le prélat. Il y a les saints officiellement déclarés par une procédure ecclésiale. Et il y a beaucoup de braves gens, inconnus du grand public, mais que, dans notre cœur, nous considérons comme des saints. Voyez, votre mère qui vient de nous quitter, vous l’aimiez et l’admiriez beaucoup. Elle était vraiment pour vous un témoin de la tendresse et de l’amour. Je crois qu’elle est sainte dans le cœur de Dieu. Ma maman, ajouta le cardinal, est morte il y a trois ans. Je crois qu’elle parle avec la vôtre ce soir. Elles nous regardent et leur bonté témoigne de leur sainteté ». Le lider Maximo s’effondra en larmes et l’entretien s’arrêta là !

Les saints officiels 

Chaque journée nous donne rendez-vous avec eux. Il s’agit de personnes ayant manifesté une vie exemplaire, conforme aux principes de la religion. Certaines ont enduré le martyre pour rester fidèles à la foi. D’autres sont sanctifiées grâce à « l’héroïcité de leurs vertus ».

Les saints témoignent d’un monde sacré, différent. La canonisation est une décision juridique formelle qui n’a pas toujours existé. Certaines personnes étaient déclarées saintes par « la clameur du peuple », dès leurs décès. Une procédure publique, stricte et parfois longue, a voulu éviter les imprévus de la rumeur publique.
Aujourd’hui nous avons besoin, peut-être plus que jamais, de témoins qui rayonnent la paix et la joie, grâce à leurs convictions religieuses. Ils nous disent que vivre en fraternité est un objectif accessible, et que la démarche d’ajustement sur l’amour de Dieu est proposée à tous et toutes.

Charles de Foucauld (1864–1916) 

Il est sans doute le plus connu des trois Français canonisés : le plus surprenant, aussi ! Aristocrate, né dans une famille catholique, il « perdit » la foi à l’adolescence puis réussit le concours de l’école militaire de Saint-Cyr. La fortune familiale lui permit de profiter des plaisirs de la vie. Il dilapida ses biens et partit avec son régiment en Algérie. Ayant quitté l’armée, il explora le Maroc, costumé en vieux rabbin miséreux ; il dessina beaucoup, subjugué par la beauté du paysage. Il noua des liens d’amitié avec les chefs locaux.
En 1886, à Paris, il connut un profond « retournement » : tout son être « appartenait désormais au cœur de Jésus ». Il devint prêtre en 1901 et s’installa en solitaire, dans un dénuement total, dans le Hoggar algérien, auprès des Touaregs. Il fut assassiné à Tamanrasset en 1916, par des musulmans fanatiques, mécontents de voir le Français vivre avec des Touaregs qui ne rejetaient pas le « grand marabout chrétien ».

« Une minute de prière »

Il collabora à plusieurs ouvrages sur la culture touarègue ainsi qu’au premier dictionnaire français-touareg. Pour rencontrer et connaître l’autre, il faut savoir sa langue, et accueillir la richesse de sa culture. Il dénonça les inégalités vécues par les plus pauvres. Il s’intéressa à la géographie, à la beauté de la nature : « J’ai peine à détacher mes yeux de cette vue admirable dont la beauté et l’impression d’infini rapprochent tant du Créateur ». Il ne provoqua aucune conversion mais sa réputation dépassa le désert, les Touaregs et les militaires français qu’il rencontrait.

En 1968, le pape Paul VI estimait que ses écrits spirituels et sa pratique de la charité totale le rendaient « digne d’être appelé Frère universel ». La prière prenait beaucoup de son temps : « Jamais un vaisseau à voile ou à vapeur ne te conduira si loin qu’une minute de prière ».

Charles de Foucaud est un saint vraiment très moderne qu’il convient de débarrasser d’une « image doucereuse, et d’une fraternité éthérée ». (Hors-série Le Figaro, mai 2022) Pour les croyants comme pour les non-croyants en Dieu, son programme est plus que jamais d’actualité : « Notre cœur a soif de plus d’amour que le monde ne peut lui en donner ; notre esprit a soif de plus de vérité que notre monde ne peut lui en montrer ; tout notre être a soif d’une vie plus longue que celle que la terre peut lui faire espérer ».

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Source : https://saintmerry-hors-les-murs.com/2022/05/12/charles-de-foucauld-frere-universel/

15/04/2022

DECLARATION DU CONSEIL PERMANENT DES EVÊQUES DE FRANCE A L'OCCASION DU 2ème TOUR DE L'ELECTION PRERSIDENTIELLE

          Publié le 13 avril 2022

C’est à l’intelligence, à la conscience et à la liberté de chacun que s’adressent les évêques, avec la gravité que requièrent l’évènement, l’état de notre pays et les crises qui traversent notre monde. Les évêques du Conseil permanent rappellent aux catholiques l’importance de voter et de le faire en conscience, à la lumière de l’Évangile et de la doctrine sociale de l’Église.

“Les enjeux en sont grands, l’issue est incertaine. Mais ce dimanche est surtout pour nous celui des Rameaux. Nous tous baptisés allons acclamer le Seigneur qui entre dans Jérusalem. Il est le roi, le seigneur de nos âmes. Lui seul est digne que nous lui attachions notre liberté. Lui seul est le roi doux et humble, qui monte sur un âne. Devant lui toute puissance politique se trouve relativisée, non pas humiliée, non pas détrônée, mais mise à sa place. Dimanche, nous n’élirons pas un sauveur de la France, ni un messie, ni quelqu’un qui devrait incarner tout le bien à faire. Nous aurons à choisir un responsable politique, homme ou femme, celui ou celle qui aura à conduire notre pays dans les temps toujours incertains où l’humanité avance, dans ces temps spécialement incertains de fractures sociales, de crise sanitaire, de crise écologique, de guerre toujours possible. Il n’aura pas la solution à tout.(…) Il ne pourra pas non plus changer les cœurs. Il aura à nous conduire tous, sur la moins mauvaise voie possible, en cherchant, selon ce que préconise le texte du conseil permanent à propos des élections, à renforcer notre élan collectif pour choisir de vivre ensemble en paix. Vivre cela n’est pas établir le Royaume des cieux, c’est le symboliser, et c’est déjà s’orienter, le sachant ou non, le voulant ou non, vers la réconciliation en Dieu.”

31/03/2022

RETOUR DE L'IMPENSABLE

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Publié le 31 mars 2022 par Christine Pedotti

« A fame, bello et peste, libera nos Domine », « De la peste, de la faim et de la guerre, délivre-nous Seigneur. » Cette antique prière (XIVe siècle) trouve aujourd’hui une terrible actualité. Après le Covid et la guerre en Ukraine se profile désormais un risque de pénurie de blé, qui, certes, augmentera chez nous le prix de la baguette, des pâtes et des biscuits, mais qui, surtout, fait planer le spectre de la famine sur les pays dépendants des importations de blé, comme l’Égypte, la Tunisie, le Liban, l’Érythrée, la Somalie, le Yémen, ceux d’Afrique subsaharienne et, dans une moindre mesure, l’Algérie et le Maroc. L’Onu vient de lancer une alerte alimentaire concernant quarante-cinq pays…

Ce surgissement de fléaux que nous pensions avoir laissé à des temps anciens et obscurs nous laisse sidérés. Déjà, voilà deux années, la pandémie mondiale nous avait saisis d’impuissance. Contre un virus nouveau, malgré les progrès de la science et de la médecine, nous n’avons eu, tout d’abord, que la ressource du confinement – cesser de bouger pour arrêter la circulation du virus. En attendant un vaccin, qui, finalement, est venu.

Et voilà que, contre toute attente, et surtout contre toute raison, le chef d’État d’un grand pays, ordinairement inclus dans le concert des nations et ayant un siège permanent au Conseil de sécurité de l’Onu, décide de mener une guerre de conquête dite « de haute intensité » contre son voisin – un peuple frère – avec l’intention pure et simple de l’annexer. La résistance ukrainienne fait dérailler ses plans mais la violence de la frappe transforme un grand pays en champ de ruines, jette des millions de gens sur les routes, fait peser sur l’Europe la menace d’une frappe « non conventionnelle ».

Nous faisons face à l’impensable. Tout ce que nous pensions stable, intangible, devient friable, fragile. Quelle est l’issue ? Elle est tout à la fois simple et rude à mettre en œuvre et tient en trois mots : vivre, faire, aimer. Vivre, c’est-à-dire accueillir chaque jour comme une nouveauté et une espérance ; faire, parce que même le plus petit des gestes retisse de la fraternité, agir pour l’Ukraine, mais aussi pour notre voisin ou notre voisine, nos proches ; aimer, car chaque acte de réconciliation, de pardon, d’élan vers autrui fait barrage au mal et au malheur.

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COUP DE CROSSE

La curie romaine appelée à une révolution

Photo : Republic of Korea (CC BY-SA 2.0)

Publié le 24 mars 2022 par Bernadette Sauvaget Photo : Republic of Korea (CC BY-SA 2.0)

Est-ce le testament de François ? Attendue depuis de longues années, la constitution apostolique Praedicate evangelium (Annoncez l’Évangile) a été officiellement signée, le samedi 19 mars 2022, par le pape. Un texte important pour le pontificat du pape argentin car il fixe les nouvelles règles de fonctionnement de la curie romaine. Une révolution ? Il faudra attendre l’entrée en application du texte, prévue le 5 juin prochain, pour tester la réelle volonté du pape de bouleverser en profondeur le mode de fonctionnement du Vatican… mais aussi les capacités de résistance des cardinaux curiaux, qui désapprouvent sûrement – mais en secret – les axes fondamentaux d’un texte promouvant, du moins en théorie, la synodalité, une forme de décentralisation de l’Église catholique et la fin de la toute-puissance du cléricalisme.

Élu il y a neuf ans, Bergoglio avait été prié par le collège de cardinaux de s’attaquer en priorité au chantier de la rénovation de la curie romaine, dirigé pendant le pontificat de Benoît XVI par le très décrié cardinal Tarcisio Bertone. Le pape François a pris son temps pour aboutir à la publication de sa nouvelle constitution apostolique, tout en apposant sa marque au fil de son pontificat. Praedicate evangelium a surpris, le week-end dernier, le petit monde romain.

Ce qu’il faut en retenir est d’abord la volonté du pape de mettre au premier plan de la curie romaine la mission d’évangélisation. Elle est contenue dans le titre même de la constitution apostolique et se manifeste par la création d’un dicastère de l’évangélisation, arrivant en premier dans la hiérarchie – avant même la Secrétairerie d’État – et présidé par le pape lui-même. Dans sa nouvelle constitution, le pape a clarifié l’organigramme de la curie, organisée désormais en seize dicastères. Parmi les innovations figure la création d’une instance consacrée à la charité, une manière de rappeler la priorité donnée aux pauvres par le jésuite argentin.

Le deuxième axe fort énoncé par le pape réside dans la volonté de redistribuer le pouvoir au sein de l’Église catholique. Pour la première fois, un texte de cette importance reconnaît explicitement qu’un laïc – même femme ! – pourrait diriger un dicastère de la curie romaine. Pour le moment, c’est le cas d’un seul au Vatican, le dicastère pour la communication, qui a à sa tête le préfet Paolo Ruffini. Cette exception est indiquée comme étant désormais la règle. Les cardinaux sont-ils prêts à abandonner cette importante prérogative ? Cela reste à voir.

Le troisième point important de cette réforme est l’accent mis sur une forme de décentralisation. En clair, le pouvoir des conférences épiscopales, par exemple, est davantage reconnu. Dans le premier texte de son pontificat, Evangelii gaudium, François avait émis l’hypothèse d’attribuer une autorité doctrinale aux conférences épiscopales. À l’avenir, pour l’élaboration des textes, la curie romaine devra travailler en collaboration avec elles.

Bernadette Sauvaget, journaliste

28/03/2022

A LA UNE

The Icons on Ammo Boxes: Art by Oleksandr Klymenko-The Savior

Image étonnante que celle de cette œuvre réalisée il y a quelques années par l’artiste ukrainien Oleksandr Klymenko.
Le Christ ressuscité, « Le Sauveur », a été peint à même le bois d’un couvercle d’une caisse de munitions.

Sur le bois,
Mort et Vie se mêlent ensemble.
Le Ressuscité recouvre et transforme ce bois marqué par la mort.

Aujourd’hui, nous assistons avec impuissance à l’invasion d’un pays, au massacre d’un peuple obligé de fuir … quand il peut encore le faire. Nous sommes les spectateurs à la fois proches et lointains de la souffrance d’hommes et de femmes victimes de la guerre en Ukraine, mais aussi dans beaucoup d’autres régions du monde.

Le temps de crises que nous traversons depuis maintenant 2 ans, nous a aussi remis devant notre finitude, la fragilité d’une vie et l’expérience de la mort.

La préparation de l’Assemblée Générale 2023 de la Mission de France nous invite à relire en équipes comment ce temps nous interroge, ce qui s’y vit d’une expérience humaine blessée et meurtrie, et à nous aider mutuellement à balbutier des paroles de foi.

Où puiser les étincelles d’espérance dont nous avons besoin, et que la fraternité nous presse à partager avec ceux dont nous sommes proches, ou avec d’autres visages plus éloignés ?
Quel temps prenons-nous ensemble pour recevoir de l’écoute des Écritures une parole de Dieu pour aujourd’hui ?

Nous sommes en route vers Pâques, et c’est encore et toujours vers le Christ que nous sommes invités à tourner notre regard, à découvrir par lui le Dieu de la Vie et à proclamer avec l’apôtre Paul : « Si nous sommes passés par la mort avec le Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec lui » (Rm 6, 8).

Anne SONCARRIEU, Déléguée GénéraleAnne SONCARRIEU élue et nommée « Déléguée générale de la Mission de France  » ! - Journal de Denis Chautard

13/02/2022

ESPERANCE

LA CROIX le 13/02/2022 à 19:40I Isabelle De Gaulmyn rédactrice en chef

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Tous les ingrédients étaient là. Une banlieue où la crise industrielle a laissé sur le carreau de nombreuses familles d’origine étrangère ; des jeunes désœuvrés, radicalisés par un islam importé ; une petite église vide, avec un vieux prêtre et quelques religieuses, peinant à conserver la flamme du christianisme… L’assassinat du père Hamel aurait pu donner raison à tous ceux qui nourrissent à longueur de discours la théorie du grand remplacement, du choc des civilisations, de la fin du christianisme et du déclin. Guidé par les propagandistes de Daech, c’est précisément ce que ce jeune de Saint-Étienne-du-Rouvray qui n’avait pas 20 ans, Adel Kermiche, a voulu provoquer en tuant le vieux prêtre : que tout le pays s’embrase.

Sauf que la « petite » église se révéla être plus solide qu’il n’y semblait, soutenue par une institution catholique capable de tenir un propos apaisant. Que l’opinion publique a reconnu dans ce vieux prêtre, fils de cheminot, une part d’elle-même. Que le maire communiste fut au côté de l’évêque. Que le président socialiste François Hollande soucieux de laïcité n’hésita pas une minute pour signifier que l’assassinat du prêtre touchait au sacré de la République. Et que les musulmans furent nombreux à manifester leur solidarité aux catholiques qui surent les accueillir.

Certains se plaisent aujourd’hui à attiser les fractures d’une société fragilisée. Dans cette drôle de campagne électorale, ils n’hésitent pas à ressasser des discours de haine opposant les Français entre eux, et à profiter du sentiment d’insécurité pour caricaturer la communauté musulmane. Le procès des assassins du père Hamel, qui commence ce lundi, est l’occasion de leur renvoyer une autre image de la France. Celle d’un pays résilient, d’un peuple capable de se retrouver sur ses valeurs. Celle d’une République qui tient bon. Et qui sait encore cultiver l’espérance. 

https://www.la-croix.com/Religion/Proces-lattentat-Saint-...

10/02/2022

LA COMPASSION POUR LES EXCLUS - MGR JACQUES GAILLOT

                                                     

En ce 23 octobre 2021, les Samedis du Prieuré -https://www.leprieure.be/ ont enfin repris en présence réelle. Mgr Jacques Gaillot, évêque de Partenia, a ouvert cette saison consacrée au thème de la compassion avec beaucoup d’humanité. S’il dit, avec un brin d’ironie, qu’il est arrivé à un âge où il devrait se taire, on se réjouit qu’il ait fait une exception pour nous. Sa parole, inspirée par l’Évangile est toujours aussi libre et jubilatoire.

Depuis 22 ans, Mgr Gaillot vit avec la communauté des Spiritains, à Paris, une ville qu’il aime parce qu’elle est toujours grouillante de monde, et qu’il peut y rencontrer beaucoup de gens de passage dans la capitale. Durant le confinement, les prêtres de cette communauté ont dû prendre en charge les tâches quotidiennes d’entretien. Il se dit heureux d’avoir redécouvert la vie ordinaire toute simple, avec les autres. Il vit le moment présent et se souvient du verset 12 du psaume 89 : « Apprends-nous la vraie mesure de nos jours et que nos cœurs pénètrent ta sagesse. » Chaque jour est en effet suffisant, chaque jour est magnifique et a sa part de lumière. Cela ne l’a pas empêché de compatir avec tous ces gens qui souffraient de ne pas pouvoir vivre normalement, travailler, voyager, se rencontrer.
De plus, le confinement a renforcé les inégalités. Il pense à cette femme qui vivait dans une seule pièce avec deux
garçons de huit et dix ans. D’ordinaire les enfants avaient un repas à la cantine, mais à présent, comment faire ? Heureusement des jeunes du quartier se sont mobilisés pour lui apporter, à elle comme à d’autres, des colis repas.
Enfin, il observe avec tristesse combien l’Église est confinée. Pour lui, l’Église est faite pour être en sortie. Il y a ceux qui se plaignent d’être privés de l’eucharistie, de la messe, mais il y a ceux aussi qui ont innové, qui ont redécouvert la prière et le partage de la Parole de Dieu en famille.

Lorsqu’il était enfant, durant la guerre, et que tout le quartier trouvait refuge dans sa cave pendant les alertes, il a été surpris de voir que les gens se mettaient à prier quand l’heure était grave. C’est aussi dans un monastère de religieuses situé près de chez lui qu’il a découvert la beauté de la liturgie. C’est cette beauté des célébrations qui lui donne le désir de devenir prêtre. À 19 ans, il entre au séminaire de Langres, il y découvre la Bible et des auteurs spirituels comme sainte Thérèse d’Avila, Jean de la Croix, le père de Foucault. Ce temps d’ensemencement et de ressourcement est capital. Et puis, à 22 ans, il est envoyé à Fréjus, pour faire ses classes dans l’infanterie coloniale : « Ça ne rigolait pas ! Beaucoup de sport et de discipline pour nous préparer à l’Algérie. On se retrouvait à 62 dans des baraquements et on dormait dans de grands dortoirs. » Après quatre mois d’apprentissage, il est envoyé en Algérie où il reste deux ans et comme il ne veut pas prendre les armes, il se porte volontaire pour des tâches de pacification. À Alger, on l’initie à l’islam, à la langue et à la culture du pays, avant de l’envoyer à Sétif, la ville rebelle depuis toujours. Il doit s’y occuper de la population, veiller à ce qu’elle ait accès à l’eau potable, à l’éducation. Il se souvient qu’un jour, trois hommes ont surgi sur la piste et arrêté son véhicule. Ils voulaient qu’il conduise à l’hôpital un des leurs qui était malade. Contre toutes les règles de sécurité qu’on lui avait enseignées, il les suit dans les collines. L’homme malade était très maigre et paralysé. Les femmes présentes le supplient de l’emmener à l’hôpital pour qu’il soit soigné. Il y avait trois quart d’heures de piste pour y arriver et il tente de les dissuader : l’homme allait mourir en route. Il y avait un tel attachement, un tel amour pour cet homme qu’il ne peut pas dire non. On bricole un brancard et on le transporte jusqu’à la Jeep. Vingt minutes plus tard, cet homme est mort dans ses bras. Il le ramène aux siens qui le remercient d’avoir tenté l’impossible. Ce qu’il retient de cet événement, c’est la solidarité que peuvent manifester les gens, leur bonté, leur gratitude.

Suite ... gaillot le prieuré.pdf

12/01/2022

VOEUX POUR 2022- VOICI L'HEURE DE SORTIR DE VOTRE SOMMEIL

   Bernard Ginisty, philosophe. Il a été co-fondateur de Démocratie et spiritualité, et directeur de Témoignage chrétien bernard ginisty.jpg

 Vœux pour 2022 : « Voici l’heure de sortir de votre sommeil »

Publié le par Garrigues et Sentiers

En ce début d’année, nous échangeons traditionnellement des « vœux ». Le mot « vœu », dans la langue française, signifie deux attitudes contradictoires. L’une traduit la futilité de ce qu’on appelle des « vœux pieux » formulés sans que leurs auteurs s’interrogent sur ce en quoi ils sont concernés par la réalisation de ce qu’ils « souhaitent », laissant ce soin à un « bon dieu ». La seconde exprime l’engagement de ceux qui se « vouent » à une cause.

L’année 2022, par l’ampleur des crises qui s’annoncent aura besoin, de notre part d’autre chose que des « vœux pieux ». Pour Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International et ancienne rapporteuse spéciale des Nations-Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, « nous sommes dans une crise des normes, qui se traduit par des attaques contre la dignité humaine, et même contre l’idée d’égalité entre les êtres humains. La mort de réfugiés et de migrants est devenue monnaie courante, presque quelque chose d'acceptable, comme si leur vie avait moins de valeur que la nôtre. La crise aigüe que nous traversons pourrait conduire nos sociétés à des situations du type 1939. Je m’interroge souvent : serons-nous la génération des années 1930 ou celle des années 1948, qui a rédigé la Déclaration universelle des droits de l’homme ? » 

Par ailleurs, il faut bien constater l’inquiétante évolution des États-Unis d’Amérique qui menace l’équilibre mondial. C’est ce que constate l’économiste Jeffrey Sachs, professeur à l’université Columbia (New York) et président du réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies : « Les États-Unis sont devenus un pays de riches, par les riches et pour les riches, refusant toute responsabilité politique pour les dommages climatiques qu’ils imposent au reste du monde. Les clivages sociaux qui résultent de cette situation ont conduit à une épidémie de « morts du désespoir » (notamment par surdose médicamenteuse et suicides), à une baisse de l’espérance de vie (avant même la pandémie due au Covid-19), à une hausse de cas de dépression chez les jeunes. Sur le plan politique, ces profonds désordres mènent vers divers chemins – le plus inquiétant étant celui de Donald Trump, son faux populisme et son vrai culte de la personnalité. Servir les riches tout en distrayant l’attention des pauvres avec la xénophobie, les guerres culturelles et les coups de menton de l’homme fort est peut-être le plus vieux truc du manuel du démagogue, mais il fonctionne encore étonnamment bien ». Kathleen Belew, professeur d’histoire américaine à l’université de Chicago écrit : « Ma grande interrogation est de savoir à quel point ces groupes du white power vont réussir à capter un auditoire dans un cercle concentrique plus large. (…) Plusieurs participants à l’insurrection du 6 janvier ont été élus à des fonctions officielles sous la bannière du parti républicain »

Cette évolution des États-Unis d’Amérique ne doit pas nous éviter d’analyser les faiblesses de la France et plus généralement de l’Union Européenne. Évoquant les cinq années où elle a été rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les exécutions extra judiciaires, Agnès Callamard constate : « Je n’ai pas trouvé que la France jouait un rôle particulièrement important ou positif en matière de droits humains. Les autorités françaises se montrent timorées dès qu’il s’agit de l’Arabie saoudite et de la Chine, privilégiant les exportations, les intérêts économiques et géopolitiques à la défense des droits » 

On a souvent reproché aux chrétiens, parfois à juste titre, de se réfugier dans un arrière monde qui les éloigne des combats pour l’homme ! Mais comment ne pas voir dans la course à l’argent, le désenchantement individualiste, les haines ethniques et raciales, les injustices établies, des “ opiums du peuple ” autrement dangereux ? La Résurrection manifeste que la force vivante en tout homme est plus radicale que ses peurs, ses échecs et ses enfermements. Elle indique, suivant l’étymologie du mot Pâques, que l’aventure humaine se réalise non dans la possession, mais dans le passage. Se vautrer dans la quête d'une intériorité toujours plus affinée est un terrain où prospèrent les idoles. Si Dieu est “ passant ”, c'est qu’il n'est pas “ présent ”. C’est dans le visage de ce qui nous est étranger que nous avons quelques chances de saisir sa trace. Au jeune homme riche qui, en règle avec toutes les lois, veut “ posséder ” la vie éternelle, le Christ propose “ d’entrer dans la vie ” en devenant étranger à ses biens (Mt 19, 1-22). Aux opiomanes tentés d’enfermer l’aventure humaine dans l’avoir, le pouvoir ou la sécurité des appartenances, le message pascal annonce : “ Voici l’heure de sortir de votre sommeil ” 

GARRIGUES ET SENTIERS

11/01/2022

LES INQUIETUDES DU PAPE SUR L'ETAT DU MONDE

Le pape François a développé, lundi 10 janvier, devant les diplomates de toute la planète, ses préoccupations pour le monde. Parmi elles : les vaccins, les migrants et la détention d’armes. Pour la première fois, il s’est montré préoccupé par la « cancel culture ».

Rome De notre envoyé spécial permanent - Loup Besmond de Senneville 

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C’est le grand rendez-vous du début d’année au Vatican. Le pape François s’est longuement exprimé, lundi 10 janvier, lors de la traditionnelle cérémonie de vœux adressés à tous les ambassadeurs accrédités près le Saint-Siège. Durant un discours fleuve, il a dressé un vaste état du monde et a adressé aux 183 États représentés devant lui une vigoureuse exhortation à agir, dans le contexte critique de la pandémie.

Car c’est bien des autorités politiques et sanitaires que dépend la distribution des vaccins, dont François a estimé que, même s’ils ne sont pas « des outils magiques de guérison », ils constituent « la solution la plus raisonnable pour la prévention de la maladie ». Depuis la salle des Bénédictions, au cœur du Palais apostolique, il a d’ailleurs fustigé, en la matière, les « informations infondées » et les « faits mal documentés » qui constituent des « idéologies » en rupture avec « la réalité objective des choses ».

« Un engagement global de la communauté internationale est nécessaire pour que l’ensemble de la population mondiale ait un accès égal aux soins médicaux essentiels et aux vaccins », a-t-il affirmé.

Insistant sur l’importance de l’éducation dans cette période troublée, il a redit sa « douleur » de constater que des abus sur mineurs avaient eu lieu « dans divers milieux éducatifs »« Il s’agit de crimes sur lesquels il faut avoir la ferme volonté de faire la lumière en examinant les cas individuels, afin d’établir les responsabilités, de rendre justice aux victimes et d’empêcher que de telles atrocités ne se reproduisent à l’avenir. »

Autre demande adressée aux États, de la part d’un pape qui est apparu inquiet pour le monde : celle d’accueillir les migrants. Le thème est d’autant plus présent chez lui qu’il estime, comme il l’avait exprimé lors de son voyage en Grèce et à Chypre, début décembre, que le sort des migrants est frappé par l’indifférence générale. S’il s’est dit « conscient des difficultés que rencontrent certains États face à des flux humains considérables », il a aussi affirmé que ces réticences ne pouvaient être le prétexte à une fermeture totale : « Il y a une nette différence entre accueillir, même de façon limitée, et repousser totalement. »

Pour le pape, la solution aux crises migratoires et climatiques se trouve dans une réponse globale, portée par des instances multilatérales. Mais la diplomatie multilatérale, grande priorité du Saint-Siège, fait l’objet d’un affaiblissement réel ces dernières années, et du « manque d’efficacité de nombreuses organisations internationales ». L’une des raisons de cette carence ? « Une forme de colonisation idéologique », a répondu François. Pour la première fois, le pape a évoqué la « cancel culture » (culture de l’annulation), qu’il a définie comme une « pensée unique contrainte à nier l’histoire »« Au nom de la protection de la diversité, on finit par effacer le sens de toute identité, avec le risque de faire taire les positions qui défendent une idée respectueuse et équilibrée des différentes sensibilités », a fustigé le pape.

En décembre, François avait critiqué un guide interne de la Commission européenne, dans lequel il était notamment recommandé de ne plus souhaiter « Joyeux Noël », afin de respecter les différentes traditions religieuses. Un épisode que le pape n’a toutefois pas directement nommé, fidèle à la tradition de la diplomatie du Saint-Siège de ne pas mettre en cause un organisme ou un État de manière frontale. On peut aussi relever l’absence de la mention de deux États, avec lesquels les relations demeurent particulièrement délicates : la Chine et la Russie.

Pour autant, le pape n’a pas évité d’autres sujets difficiles, et à ses yeux prioritaires, comme la détention d’armes. « On a parfois l’illusion que les armements ne remplissent qu’un rôle dissuasif contre d’éventuels agresseurs, a-t-il averti. L’histoire, et malheureusement aussi l’actualité, nous enseignent que ce n’est pas le cas. Celui qui possède des armes finit tôt ou tard par les utiliser. » Une inflexion claire dans la doctrine, qui a longtemps condamné l’utilisation des armes, tout en reconnaissant à la dissuasion une forme de légitimité.

Paroles

« Son diagnostic sonne vraiment très juste »

Patrick Renault
Ambassadeur de Belgique près le Saint-Siège

« Je suis frappé par les propos du pape sur plusieurs points. D’abord, sa condamnation des fausses rumeurs sur les vaccins est claire. Cela peut avoir un impact important sur ceux qui aujourd’hui, notamment en dehors d’Europe, utilisent des arguments religieux pour tenir des discours anti-vaccination. Ensuite, son diagnostic sur le multilatéralisme et la crise des organisations internationales sonne vraiment très juste. Lorsqu’il parle du manque d’efficacité de ces organismes, on ne peut qu’être d’accord. Enfin, il exprime une réelle inquiétude sur le fait que le processus de paix entre Israël et Palestine n’ait pas avancé et il promeut des négociations avec l’Iran pour un accord sur le nucléaire. C'est le soutien fort et très significatif."

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  Recueilli par Loup Besmond de Senneville (à Rome)